Le meilleur intérêt de l’enfant : grandir avec son père et sa mère
La Suisse ouvrira-t-elle partiellement la possibilité aux couples homosexuels d’adopter des enfants ? C’est la question que se posera demain le Conseil national, après que le Conseil des Etats se soit déjà prononcé en faveur d’une motion demandant au Conseil fédéral de modifier le droit dans ce sens. Le Réseau évangélique suisse estime que cette motion n’est pas une bonne solution : elle créerait plus de problèmes qu’elle n’en règlerait.
Le Conseil national prévoit d’examiner demain une motion visant à permettre à tout adulte d’adopter l’enfant de son ou sa partenaire enregistré(e), à condition que cette adoption constitue la meilleure solution pour le bien-être de l’enfant. Concrètement, cette modification législative permettrait à une personne homosexuelle de devenir le second parent de l’enfant de son partenaire.
Une situation relativement rare
« Beaucoup d’enfants grandissent déjà avec leurs parents homosexuels » avancent ceux qui soutiennent cette motion. Il s’agirait donc d’adapter le droit à une réalité bien présente : celle des familles recomposées autour d’un couple homosexuel. Combien d’enfants sont véritablement dans cette situation ? Nul ne semble être en mesure de le dire aujourd’hui. Mais quand on constate qu’entre 2007 et fin 2011, seuls 5'199 couples homosexuels ont été enregistrés, on est en droit de se demander si le Parlement n’est pas en train d’envisager une modification législative complexe et coûteuse pour un cas de figure somme toute relativement rare. Le RES estime qu’une étude évaluant le nombre d’enfants concernés serait un préalable nécessaire.
Un cadre juridique suffisant
Par ailleurs, le RES est d’avis que le cadre juridique existant permet déjà de répondre à ces situations. Contrairement à un enfant orphelin ou abandonné, les enfants visés par cette loi ont en effet un parent biologique reconnu. Sans passer par l’adoption, le partenaire enregistré peut déjà représenter l’autre partenaire dans l’exercice de l’autorité parentale. De plus, il est déjà tenu d’assister son partenaire dans l’accomplissement de son obligation d’entretien. En cas de décès du père ou de la mère biologique, l’adoption par le partenaire restant peut aussi être demandée. Si malgré tout cela, une adaptation de certains aspects du droit était jugée nécessaire dans l’intérêt de l’enfant, après une étude approfondie de la question, le Conseil fédéral devrait envisager la possibilité de prendre des mesures qui répondent à ces cas de figure sans pour autant passer par une modification du droit d’adoption.
Car cette nouvelle législation serait une source de nouvelles complications, puisque en principe seules deux personnes maximum peuvent être dotées de l’autorité parentale. Dans le cas de l’adoption par le partenaire homosexuel, soit l’autre parent biologique, s’il est en vie et qu’il est doté de l’autorité parentale, devrait perdre cette autorité ; soit le droit devra être adapté de sorte que l’enfant puisse avoir trois « parents », ce qui crée de nouveaux problèmes.
La question du meilleur intérêt de l’enfant
La motion précise que l’adoption aurait uniquement lieu si elle s’inscrit dans le meilleur intérêt de l’enfant. Il est utile de rappeler que plus de trente années de recherches ont démontré qu’il est dans le meilleur intérêt de l’enfant de grandir auprès de ses parents biologiques, dans le cadre familial stable offert par le mariage, où le potentiel de conflit est plus faible. En grandissant au sein de leur famille naturelle, les enfants traversent mieux les différentes étapes de leur développement personnel, ils ont de meilleurs résultats scolaires, ils ont moins de troubles émotionnels et parviennent davantage à assumer leurs responsabilités une fois adultes. Au contraire, un noyau familial composé de deux personnes du même sexe semble plutôt être préjudiciable pour le développement harmonieux de la personnalité de l’enfant et pour son adaptation sociale, même si l’on manque encore de recul sur cette question pour l’affirmer avec certitude.[1] Le fait qu’un couple homosexuel puisse aimer un enfant tout autant qu’un couple hétérosexuel n’est pas remis en question. Mais l’enfant a besoin d’un référent maternel et paternel. Dans cette perspective, la protection du meilleur intérêt de l’enfant implique de ne pas encourager l’adoption par les couples homosexuels.
Soutenir le mariage traditionnel
Plutôt que d’ouvrir l’adoption aux couples homosexuels, l’Etat devrait s’appliquer à soutenir le mariage traditionnel. Comme l’a rappelé le RES dans une résolution adoptée en 2011, « [l]es couples en bonne santé sont souvent source de créativité pour affronter ensemble les défis sociaux et économiques du quotidien. En tant que communauté stable, les couples mariés sont prêts à agir avec efficacité et avec le souci de supporter leurs charges de manière autonome. L’échec d’un mariage entraîne en revanche un coût social dont on ne mesure pas assez la portée. Bien que ces situations pèsent massivement sur l’Etat et les institutions sociales, il semble que ces coûts ne soient pas chiffrés par les autorités. Les délégués de la SEA∙RES attendent de la part des autorités qu’elles évaluent ces coûts afin de pouvoir mettre sur pied une stratégie de prévention efficace. »
[1] Mark REGNERUS, « How different are the adult children of parents who have same-sex relationships? Findings from the New Family Structure Study », Social Science Research, vol. 41, 2012, pp. 752-770.
Cette étude menée aux USA auprès de 3’000 adultes provenant de huit structures familiales différentes, évalue 40 critères sociaux et émotionnels différents. Elle confirme que les enfants ayant grandi dans des familles biologiques intactes se portent mieux à tous points de vue. En revanche, les enfants élevés par une mère lesbienne en couple ont les plus mauvais résultats. 8% des enfants élevés dans des familles biologiques intactes étaient sans emplois, contre 28% pour les enfants élevés par une mère lesbienne en couple et 20% par un père gay en couple. Les personnes élevées dans un foyer homosexuel étaient plus de deux fois plus nombreuses à suivre une thérapie (19% contre 8%). 10% des enfants issus de familles biologiques dépendent de prestations sociales, contre 38% respectivement 23% pour ceux ayant grandi avec une mère lesbienne ou père gay en couple homosexuel. 23% des enfants de mères homosexuelles avaient été victimes d’un abus sexuel par un parent ou un adulte (6% pour les enfants élevés par un père gay en couple), contre 2% chez les enfants élevés au sein de leur famille biologique.
12 décembre 2012