Le pasteur Montreuil F. Milord présent en janvier 2006 à Sète lors du congrès pour l’évangélisation est le pasteur d'une communauté méthodiste haïtienne aux Etats Unis. Nous l'avons interrogé sur sa pratique de l'évangélisation et ses rapports avec sa patrie d’origine sinistrée. JP.W
ENroute — Que l’on soit en Haïti, aux États Unis ou en France, l’Église, les croyants sont confrontés à une même nécessité, évangéliser, annoncer Jésus-Christ.
MM — Oui, bien sûr, parce que je crois que l’évangélisation est un mandat pour tous les chrétiens évangéliques. C’est un devoir impérieux : tous les membres doivent s’engager à la recherche d’âmes perdues, car Jésus-Christ nous a donné cette mission, allez par tout le monde et faites des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.
ER — Concernant ta communauté, comment ça se passe, comment ça se vit au quotidien ? Elle rassemble en majorité des Haïtiens francophones ?
MM — Oui des Haïtiens francophones. Leur langue maternelle est aussi bien le créole que le français. Mais pour que le plus grand nombre puisse comprendre le message de la parole de Dieu, il est plus naturel pour moi de prêcher dans la langue vernaculaire, c'est-à-dire le créole. D’un autre côté, il y a les jeunes. Ils ne savent pas le créole, ils ne savent pas le français, d’où l’obligation pour moi de prêcher en anglais afin de ne pas perdre les jeunes, car s’ils viennent à l’église sans rien y comprendre, ils s’en iront ailleurs et rejoindront une église américaine.
ER — Comment se vit cette évangélisation à la fois par rapport aux jeunes qui montent et qui s’éloignent peut-être de leurs racines ? Comment se passe la communication de l’Évangile, ce n’est pas évident, si ?
MM — Oui, ce n’est pas évident, mais on essaie d’avancer en faisant des visites aux malades, à ceux qui ne peuvent pas venir à l’église. On met aussi en place des programmes spécifiques pour les jeunes (cinéma, jeux, chorale) et on les encourage à y participer comme à y rester.
ER — Quelle est la situation matérielle des paroissiens ? Ils sont rangés, ont-ils trouvé leur place dans la société américaine ou restent-ils parmi les marginaux, en situation précaire ?
MM — Je crois que la majeure partie des Haïtiens fait de son mieux pour s’adapter à la culture américaine. Nous pouvons dire qu’il y a toujours des luttes ; si certains Haïtiens sont des intellectuels, la plupart occupent des emplois dans la restauration et l’hôtellerie et font un travail que les Américains n’aiment pas faire. En règle générale, ils trouvent les moyens pour subsister.
ER — Question inévitable : on reste conscient de ses origines, on reste soucieux de sa famille d’origine, on cultive des relations et des liens avec le pays d’origine, Haïti ?
MM — Oh oui bien sûr. C’est pourquoi, lorsque les Haïtiens travaillent, ils envoient une partie de leurs revenus en Haïti pour aider leurs parents dans leurs besoins journaliers. Nous avons des liens serrés avec nos familles respectives en Haïti.
ER — Vous mettez en place un partenariat peut-être d’une église à l’autre.
MM — Oui, nous établissons ce qu’on appelle une covenant/alliance entre églises haïtiennes aux États-Unis et des églises en Haïti pour pouvoir échanger, mettre au point des campagnes d’évangélisation, des séminaires et entretenir des liens entre églises haïtiennes américaines et Haïti.
ER — Cela va jusqu’à des échanges et des déplacements mutuels ?
MM — Oui, parfois on y va pour des réunions ou un séminaire quelconque.
ER — Bonne poursuite.
Source: EEMNI