Motion à la Conférence annuelle 2014, à Frauenfeld
Le texte ci-après, qui porte sur le projet de modification de la Constitution fédérale et de la loi sur la procréation médicalement assistée en lien avec le diagnostic préimplantatoire (Objet fédéral 13.051), est publié sous forme de prise de position officielle de l'Eglise Evangélique Méthodiste Suisse-FranceAfrique du Nord.
Il est inconcevable de juger de la valeur d'une vie, toute vie humaine doit être acceptée
En 2015, le peuple suisse sera appelé à voter sur l'introduction du diagnostic préimplantatoire.
Le diagnostic préimplantatoire (DPI) est un procédé médical permettant, dans le cadre d'une insémination artificielle (fécondation in vitro, FIV), d'examiner le patrimoine génétique des embryons avant qu'ils soient implantés dans l'utérus dans la perspective d'une grossesse.
Ce procédé vise à éviter que dès enfants nés par insémination artificielle souffrent de maladies congénitales. Jusqu'ici, ce procédé était interdit en Suisse et seul le nombre d'ovules humains « pouvant être immédiatement implantés» (max. 3) pouvaient être développés hors du corps de la femme jusqu'au stade d'embryon (art. 119, al. 2c, est.).
En vertu du projet de loi, il devrait désormais être possible, lorsqu'il est admis que des parents présentent des prédispositions génétiques entraînant, pour l'enfant, un risque d'être atteint d'une maladie, de développer autant d'embryons que nécessaire pour favoriser la procréation médicalement assistée. Le législateur évoque un maximum de huit embryons développés par FIV. Après avoir fait l'objet d'analyses destinées à dépister des maladies, les embryons ne pouvant être utilisés pour l'implantation sont détruits. La sélection ne peut être effectuée que lorsqu'il n'existe aucun autre moyen d'écarter le risque concret que le couple parental se retrouve dans une situation inacceptable.
La nouvelle loi autoriserait en outre la congélation (cryoconservation) d'embryons. Toutes les autres possibilités d'applications du DPI demeurent quant à elles interdites, en particulier la production d'un « bébé sauveur » (Le DPI peut en effet être utilisé pour produire un « bébé sauveur» ayant des cellules souches génétiquement compatibles avec celles d'un frère ou d'une sœur déjà né et atteint de maladie, et pouvant donc servir de donneur.) et la sélection du sexe sans aucun lien avec une maladie grave.
En introduisant cette loi, l'Office fédéral de la santé publique estime qu'entre 50 et 100 couples par année auraient recours à un DPI dans leur tentative d'avoir un enfant.
Le diagnostic préimplantatoire soulève des questions fondamentales et ses conséquences posent problème.
- Le DPI nous confronte au problème fondamental de devoir décider quelle vie vaut la peine d'être vécue et quelle vie n'en est pas digne. Même si cette décision est prise à un stade très précoce de la vie humaine, elle détermine aussi la valeur de la vie des adultes atteints des maladies pouvant être dépistées par le DPI. Le droit d'être protégé et la dignité d'un être humain peuvent-ils dépendre du jugement de tiers?
- Où se trouve la limite de ce qui est acceptable pour les parents? Les parents décident-ils eux-mêmes de ce qu'ils peuvent accepter? Attend-on des parents présentant des prédispositions génétiques qu'ils se soumettent désormais tous au DPI? Comment les assurances traiteront-elles les enfants souffrant des maladies concernées? Les enfants seront-ils encore assurés?
- Que se passera-t-il avec les embryons surnuméraires congelés? Qui garantira qu'ils sont définitivement supprimés et ne risquent pas d'être réutilisés à d'autres fins? A qui appartiendront ces embryons surnuméraires congelés?
- A quoi faut-il s'attendre après le DPI? Les limites restrictives qui figurent encore dans la nouvelle loi seront-elles préservées?
En tant que chrétiens, nous croyons que le début et la fin de la vie sont des limites que Dieu fixe à l'existence humaine (Principes sociaux, 161 II. J). A travers la pensée biblique selon laquelle l'être humain est créé à l'image de Dieu (Genèse 1,27), toute personne se voit promettre une dignité, que le psalmiste exprime par ces paroles étonnantes: «Tu m'as fait ce que je suis, et tu m'as tissé dans le ventre de ma mère. Merci d'avoir fait de moi une créature aussi merveilleuse: tu fais des merveilles et je le reconnais bien. » (Psaume 139, 13s). La vie humaine créée par Dieu revêt (sans exception) une valeur intangible.
Les Principes sociaux (http://ueem.umc-europe.org/foi/principes-sociaux---credo.html) de l'Eglise Evangélique Méthodiste déclarent au point III. La communauté sociale, O) Génie génétique:
« La responsabilité des êtres humains envers la création de Dieu nous appelle tous à faire preuve de circonspection face aux possibilités de la recherche et des techniques en matière de génétique [. .. ]
Nous rejetons tout traitement génétique à des fins eugéniques et tout procédé génétique générant la production d'innombrables embryons. »
Bien que nous comprenions le désir des parents de donner naissance à un enfant sain, nous considérons qu'il est très préoccupant que l'introduction du DPI s'accompagne de l'obligation de décider de la valeur ou de l'absence de valeur d'une vie humaine. Pour ce motif, et pour toutes les autres raisons exposées ci-dessus, la Conférence annuelle de l'Eglise Evangélique Méthodiste Suisse-France-Afrique du Nord rejette l'introduction du diagnostic préimplantatoire.
Adopté à la session de la Conférence annuelle Suisse-France-Afrique du Nord le 28/06/2014, à Frauenfeld
eemni