CNEF: « Liberté, égalité, laïcité », quelle place pour les évangéliques ? »


Tel était le thème de la Convention Nationale des Evangéliques de France (CNEF) qui a eu lieu à Pontoise les 22 et 23 janvier. Parmi 700 autres participants, le pasteur Jean-Marc Bittner (EEM Metz) y a assisté. Ici sa contribution.

Si le thème de la laïcité semble plus politique que chrétien, c’est qu’il appartient en effet au domaine politique.

La laïcité, c’est la liberté de conscience pour chacun, la séparation du politique d’avec les religions, la neutralité religieuse de l’Etat qui doit garantir la libre expression de toutes les expressions religieuses en public comme en privé.


« La laïcité, c’est laisser de la place au soleil à tous !» (Nancy Lefèvre, oratrice).

Si la fameuse loi de 1905, dite loi de séparation des Eglises et de l’Etat, est la loi emblématique de la laïcité, saviez-vous que les principes de la laïcité plongent leurs racines dans un terreau chrétien et même évangélique, bien avant la Révolution française ?


Jacques Buchhold, un des orateurs de la convention, a évoqué la figure du pasteur baptiste Roger Williams qui a fondé l’Etat de Rhode Island aux USA vers 1640 sur les principes de neutralité de l’Etat par rapport à la religion et de libre exercice de toutes les religions, «y compris pour les Turcs (musulmans), Juifs et antichrétiens.».


Mais dès le temps de la Réforme protestante du 16ème siècle, quelques protestants dissidents avaient mis l’accent sur l’expérience d’une conversion personnelle à Jésus- Christ, avec comme corollaire le baptême des seuls croyants. Une telle conception écarte toute idée d’un «Etat chrétien» et de citoyens globalement considérés comme chrétiens, du simple fait de leur baptême de nourrissons et cela induit ipso facto la séparation du religieux et du politique.

D’ailleurs, ces protestants dissidents (les anabaptistes) voulaient aussi que la puissance politique ne se mêle pas de religion.

Si la laïcité bien comprise favorise le vivre ensemble, certains la détournent de son objet pour en faire du laïcisme et voudraient interdire toute expression de foi en dehors de l’espace privé.
Ce laïcisme devient alors une véritable religion, «idole sans visage et sans contenu», selon l’expression d’Etienne Lhermenault, président du CNEF et orateur de la convention. 

Si nous bénéficions de la laïcité en France, bien des pays ont une religion officielle, les autres cultes étant tout juste tolérés, sinon interdits, ce qui entraine souvent la persécution pour les chrétiens et adeptes d’autres religions dans ces pays.

Le principe de laïcité nous donne une liberté d’expression, qui ne doit pas devenir une liberté d’agression. Des mots et des dessins peuvent allumer un feu aussi sûrement que des armes !

La laïcité et la liberté sont des valeurs précieuses, mais toujours secondes. Elles nous permettent surtout de remplir la mission que Jésus-Christ nous a confié : annoncer l’Evangile et faire des disciples (Matthieu 28 : 19).

3 défis à relever


Etienne Lhermenault a présenté 3 défis à relever :
1) Si l’Etat qui est soumis à la neutralité religieuse, ce n’est pas le cas des citoyens. Nous devons recouvrer notre liberté de parole sans honte. Nous n’avons pas à être complexés d’annoncer l’évangile, y compris dans l’espace public, c’est un droit, pas une grâce ni une tolérance !

Usons donc de la liberté que nous avons, avec comme seule arme l’épée de l’Esprit, la Parole de Dieu (Ephésiens 6 : 17)
2) Les normes éthiques que nous trouvons dans la Bible sont sensiblement différentes de ce qui se vit dans notre société, en particulier au niveau de l’éthique de la sexualité, des questions de début et de fin de vie, etc... Nous devons pouvoir assumer et enseigner sans honte ni crainte ce que nous pensons être juste, même si nous savons que cela va choquer, mais y a t-il une bonne façon de dire que le péché est péché ?

3) Beaucoup d’Eglises et d’œuvres chrétiennes sont engagées dans des actions sociales. Nos autorités apprécient ces actions, mais voudraient que nous taisions les motivations de notre action. Or, si nous cherchons à aider notre prochain, c’est parce que nous l’aimons et que nous sommes motivés par une foi vivante. Nous devons pouvoir dire que nos actions sociales sont ouvertement faites au nom de Christ.

Si au niveau de l’Etat, la laïcité permet aux citoyens de vivre ensemble avec leurs différences, dans nos Eglises, -qui ne sont pas laïques !-, nous devons aussi pouvoir vivre ensemble avec nos différences, c’est le Seigneur qui nous le demande (Eph. 4. 3).

Jean-Marc Bittner 

EEMNI