La session extraordinaire de l'ONU "Beijing+5" qui se tenait du 5 au 10 juin à New York a été perturbée par des croyants ultra-religieux. Déjà, les sessions préparatoires qui s'étaient déroulées en Suisse au printemps dernier avaient été massivement chahutées par ces mêmes cercles, en particulier au moment où les discussions ont porté sur le droit des femmes à l'autodétermination en matière sexuelle, comme le rapporte Claudia Michel, la coordinatrice des ONG suisses. Les groupes féminins des Eglises suisses continuent néanmoins de militer en faveur de l'application du droit des femmes. A New-York, le Vatican, des chrétiens ultraconservateurs de même que des musulmans ont fait obstruction. Les femmes méthodistes ont prêté des locaux, un Centre ecclésial situé à proximité- aux ONG pour leur permettre de poursuivre leurs échanges. On notera pourtant quelques succès à l'actif de cette rencontre. Le document final de New York désignera expressément pour la première fois l'excision comme étant «une atteinte aux droits de l'homme». Patricia Schulz, la Suissesse chargée de la parité hommes/femmes et Rosemarie Baer, représentante des organisations non-gouvernementales, citent les passages portant sur la violence contre les femmes parmi les maigres résultats positifs de la Conférence Mondiale des Femmes. On y cite aussi pour la première fois les meurtres d'honneur -longtemps sujets tabous- perpétrés dans des pays comme le Pakistan et l'Afghanistan, mais on y dénonce aussi le viol dans le couple. Les Etats signataires s'engagent à prendre des mesures contre la violence domestique affectant les femmes. Dans des pays comme le Nicaragua par exemple, quasiment toutes les secondes femmes peuvent témoigner de violences de leur mari à leur endroit. Mais les délégations n'ont pas été en mesure de faire progresser des dossiers aussi controversés que l'avortement, la famille et l'autodétermination. «Sous cet angle, la question de l'avortement est tout particulièrement pressante», déclare la Suissesse chargée de la parité hommes/femmes, «parce que chaque année presque 500'000 femmes meurent des suites d'un avortement effectué par des personnes non-compétentes.» Le retard pris dans les négociations est lié à la règle du consensus propre aux Conférences de l'ONU. Cela donne à chaque Etat pratiquement un droit de veto. C'est ainsi que même de petites délégations, comme celles du Vatican ou de la Lybie, peuvent démontrer une grande efficacité. Les quelques 1200 organisations non-gouvernementales se sont rencontrées en marge de Conférence de New York. Elles n'ont pas de sièges ni voix au chapitre dans les groupes de travail, qui avaient délibéré sur les différentes textes. Eva Quistrop, de la section allemande de l'organisation des femmes de l'ONU Unifem, décrit pour cette raison le document final comme «le plus petit dénominateur commun». «Nous aurions désiré obtenir bien plus, c'est sûr!», affirmait Quistrop, «mais n'aurions pas pu obtenir de consensus». Avec l'expérience de trois Conférences de Femmes de l'ONU durant les dernières 20 années, Eva Quistrop replace le document final de New York dans une perspective historique: «Les résultats de telles conférences vous devez les comprendre comme la Bible. Ce qui est déclaré ici ne peut pas être remis en question mais fait autorité auprès des gouvernements. Avant tout: les femmes peuvent s'y référer.» Hillary Clinton a été la vedette discrète de cette Conférence des femmes de l'ONU à New York. La First Lady des USA a été ovationnée frénétiquement par les déléguées après son discours. Madame Clinton a engagé les gouvernements du monde à investir en premier lieu dans la formation des femmes. «Aussi longtemps que des millions de personnes ne sont pas envoyées à l'école, nous n'avons pas rempli notre mission.» Les représentantes du bureau suisse de la parité hommes/femmes et des organisations non gouvernementales déplorent de leur côté avant tout le nombre réduit de femmes aux postes de direction dans l'économie et l'administration suisse. La participation des femmes aux gouvernements cantonaux ne dépasse pas les 20%. Rosemarie Baer et Patricia Schulz relèvent aussi un déficit dans les Caisses d'Assurances Sociales. En moyenne, les femmes en Suisse gagnent un cinquième de moins que leurs collègues hommes. Et la répartition des tâches à la maison est toujours la même comme par le passé. La délégation suisse dénonce les lacunes persistantes en matière de parité, le décalage entre la théorie et la pratique sur le terrain en Suisse.
>Source: Reformierter Pressedienst et Neue Luzerner Zeitung