Lendemains de guerre, analyse d'une théologienne américaine Susan Thistlethwaite

La guerre en Irak, bien que terminée, n'a pas fini d'inspirer des commentaires dans les rangs des responsables d'Eglise.


De passage à la faculté de théologie protestante de Paris, Susan Thistlethwaite, pasteure de l’Église Unie du Christ aux États-Unis, professeur de théologie protestante et présidente du Chicago Theological Seminary, donne son sentiment sur la dimension religieuse prise par ce conflit. Elle déclare sans embages dans les colonnes du quotidien catholique La Croix que "le droit religieux a capturé la Maison-Blanche". Le religieux imprègne la Maison Blanche dans la grande tradition de la religion civile: «Ce pays a été fondé comme la nouvelle Jérusalem, pour échapper aux persécutions religieuses. C’était un miracle de trouver une nouvelle terre, d’y établir une nouvelle société. Depuis, l’interprétation religieuse du pays a toujours été liée au sentiment démesuré d’avoir été béni par le créateur, […] y compris à travers les critères du matérialisme.»


Sous cette influence, la politique de Bush a pris une dimension religieuse: «Dieu soutient le pouvoir américain, et ne bénit pas les autres nations, dont les intentions ne sont pas à respecter. Surtout celles des pays qui s’opposent aux États-Unis, et qui sont le mal. L’islam est l’incarnation du mal.» 


Pour cette théologienne américaine, le conflit oppose deux fondamentalisme, qui ont tous deux tendance à diaboliser systématiquement l'autre camp: «La vision de G. W. Bush est très simple: tout le bien est du côté des États-Unis, le diable est de l’autre. Et toute frappe, même préventive, est juste quand elle agit contre le mal.»


Les Églises américaines catholique et protestantes (notamment l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM), dont George W. Bush est membre, se sont opposées à cette guerre en s'appuyant précisément sur cette notion théologique de guerre juste aujourd'hui totalement dépassée aux yeux de cette théologienne: détournée par le concept de «guerre préventive», la notion de guerre juste «n’est plus utilisable» de nos jours. «Il aurait fallu tenir un langage théologique en réponse à la doctrine religieuse de Bush. Mais les théologiens protestants américains n’y sont pas préparés», constatait Susan Thistlethwaite. Une réflexion encore à mener.

Source: EEMNI/La Croix