La foi permet aux noirs américains de concevoir la vie sous un jour positif malgré les obstacles économiques et sociaux, voilà ce qu'une étude récente fait ressortir. Cette étude, menée par Ventura, Calif.,-dans le cadre du «Barna Research Group», examine le mode de vie des noirs américains, leurs attitudes, leurs relations et leur foi. Les résultats de l'enquête portent un coup fatal aux clichés que les blancs et les autres traînent à propos des noirs et des Eglises noires, selon Barna.
Les responsables noirs américains de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) ne sont pas surpris par ces résultats. «Notre peuple n'a pu survivre que d'une seule façon, -quand d'autres cultures,elles, avaient été exterminées-, par sa foi tenace en Dieu,» déclarait le pasteur A. Okechukwu Ogbonnaya, Chicago. Malgré une succession de crises, qu'elles soient naturelles ou provoquées par l'homme, les noirs croient que «Dieu est fondamentalement bon et que Dieu a en vue notre salut,» dit-il. Le pasteur est vice-président du comité de rédaction de l'«Urban Ministry Inc.» à Chicago, qui est une maison d'éditions chrétienne noire américaine.
Ogbonnaya, un pasteur ordonné de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) natif d'Enugu, Nigéria, ajoutait que ni les Africains, ni les noirs américains ne voyaient le salut en termes individuels. «Notre but, c'est le salut global de la communauté,» disait-il. «Notre pensée est fondée sur la conviction que Dieu prend part à notre vie, que les circonstances soient bonnes ou mauvaises. Il est présent ici et maintenant, et nous serons là où se trouve Dieu et où qu'il soit», ajoutait-il.
L'étude, «Les noirs américains et leur foi» (en anglais: "African Americans and Their Faith,") a porté sur 1,100 adultes noirs, sur 400 adolescents noirs et sur 400 pasteurs d'Eglises chrétiennes noires à travers le pays. Il en ressort que la foi joue un rôle significatif dans la vie de noirs américains.
«A se fier dans les principes de leur foi chrétienne plus qu'en autre chose, ce segment de population a été capable d'aborder la vie sous un angle positif, tout en faisant l'expérience de situations difficiles», déclarait le chercheur.
De plus, 94% des réponses montrent que les noirs américains ont pour but premier d'avoir une relation étroite, personnelle avec Dieu. Marilyn Magee, directrice de l'«Office of African American Ministries» auprès de l'«United Methodist Board of Discipleship» à Nashville, Tenn., trouvait surprenante cette dernière observation -ce pourcentage de gens en quête d'une relation étroite et personnelle avec Dieu- elle nuance le jugement à partir de considérations démographiques: ces chiffres doivent être mis dans leur contexte, laisse-t-elle entendre; ce pourcentage pourrait être exact pour des adultes de plus de 40 ans. Etant donné que plus de la moitié de tous les noirs américains ont moins de 30 ans, ce pourcentage pourrait ne pas s'avérer exact pour l'ensemble de la population, dit-elle.
Selon cette étude, 92% des noirs croient que durant les temps de crises, ils étaient «absolument certains» de pouvoir compter sur Dieu, pour qu'il réponde à leurs prières.
«Se reposer sur la foi chrétienne n'est pas un signe de faiblesse», déclare de son côté Andris Salter, directeur exécutif du «Strengthening the Black Church for the 21st Century Initiative», un programme de l'EEM basé à Dayton, Ohio. «Les noirs américains sont intimement persuadés que Dieu au centre de leurs décisions.»
Les noirs américains ont une foi plus profonde que les blancs ou que les hispaniques, voilà un autre point révélé par cette étude. Les adultes noirs sont fondamentalement plus portés qu'un autre groupe ethnique à croire que la Bible est totalement fiable dans tout ce qu'elle enseigne, affirme le rapport.
En outre, la moitié de tous les noirs adultes attribuent leur capacité à subir des préjudices et à endurer l'injustice à la certitude qui les anime d'une vie promise après la mort, basée sur leur foi au Christ.
«La foi prime dans la vie des noirs américains. Les chercheurs, semble-t-il, ont de la peine à comprendre comment nos ancêtres pouvaient connaître le grand mystère de Dieu bien avant le «Middle Passage» (la route de la traite des anciens esclaves de l'Afrique à l'Amérique), disait Magee. «Il était facile pour nous d'adopter la foi chrétienne. De toutes les manières, nous avions toujours su que nous étions plus que des êtres physiques. Nous sommes aussi des créatures dotées de l'Esprit même de Dieu.»
L'étude laisse entendre que la plupart des noirs américains affirment pour seule raison de vivre le fait de connaître, d'aimer et de servir Dieu; elle constatait également qu'un pourcentage similaire de noirs adultes tiennent la foi comme une source de force émotionnelle. «Ceux-là mêmes qui ont remportés tant de victoires dans la lutte contre les inégalités ne peuvent pas s'attribuer les succès,» déclare Salter. «C'est un effet de la grâce de Dieu, de sa miséricorde et de son amour infini de nous permettre de surmonter les obstacles.....»
L'Eglise chrétienne est au coeur de la vie de noirs adultes, l'étude fourmille d'indicateurs à ce sujet, déclare Barna. Pour des noirs américains de plus de 40 ans, l'Eglise occupe une place centrale selon Magee. C'est aussi vrai pour les jeunes sondés dans cette enquête et actifs dans leurs communautés. L'Eglise pourrait très bien ne pas jouer un rôle aussi important chez les sondés ne faisant pas partie d'une communauté, précise-t-elle.
«Dieu a toujours été au coeur des maisons noires américaines,» déclare de son côté Salter. «On se tourne vers Dieu pour trouver de l'aide, c'est là une façon de vivre. La foi est au premier rang et au centre.... nous n'avons pas à nous étendre là-dessus.»
Autre constat ressortant de l'étude: les 2/3 de tous les adultes noirs américains tiennent les pasteurs comme les responsables les plus importants et les principaux porte-parole de la communauté 'black'. Historiquement, les noirs américains vénèrent depuis toujours leurs leaders religieux. Cet aspect culturel peut remonter à l'Afrique, déclare Ogbonnaya. «C'est une part de la tradition africaine, une tradition qui nous convie à respecter nos leaders religieux. C'est un concept que les noirs américains n'ont pas perdu.» Vu le contexte africain et vu le contexte noir américain, on est convaincu que Dieu appelle les leaders religieux et qu'il paraît logique de les respecter, dit-il.
Les pasteurs noirs interrogés considèrent pour la plupart que l'Eglise doit se préoccuper en priorité des gens en crise. L'Eglise a aussi pour rôle majeur de rassembler les noirs et de les greffer sur un projet commun. Quand on lui demande si l'Eglise a d'abord pour objectif de faire des disciples ou d'aider des gens en crise, Ogbonnaya répondra que l'Eglise a ce double rôle. «On ne peut pas séparer le 'discipulat' de l'aide apportée aux gens en crise,» dit-il. «Le salut a toujours été global, jamais partiel.» Dans le contexte africain, «le salut inclut tous les aspects de la vie, et les noirs américains ont retenu cette évidence,» ajoute-t-il. «On ne fait jamais la distinction entre la crise que traverse une personne et le salut religieux qu'elle est appelée à vivre. Une personne en crise est appelée à faire l'expérience de Dieu.» Ogbonnaya affirme: «La crise est l'occasion de démarrer une vie de disciple.» Quand il accompagne quelqu'un en crise, Ogbonnaya dit qu'il «injecte la divinité dans la conscience de la personne. Voici la question la plus importante que pose une personne en crise: où est Dieu? Je dirais qu'un véritable disciple se met en quête de Dieu au coeur de sa crise. ...»
Sur le chapitre du sens communautaire, l'enquête menée auprès de noirs adultes, jeunes et pasteurs fait apparaître une perte de la cohésion sociale dans ce milieu. Salter n'est pas d'accord: «Je crois que les noirs américains ont le sens de la communauté aujourd'hui plus que jamais.» Elle admet que bien des noirs souffrent de solitude et ont besoin de la communauté, mais pour les noirs américains, pense-t-elle, la communauté n'inclut pas seulement les proches immédiats, mais aussi la famille, l'Eglise, le travail et les amis.
L'enquête de Barna que 3/4 des adultes noirs (74%) et quasiment 2/3 des jeunes noirs 62%) estime que les relations interraciales aux Etats Unis se détériorent plutôt qu'elles ne s'améliorent. «L'idée que les noirs soient traités différemment des autres ethnies par la police et le système judiciaire est fort répandue chez les noirs américains», fait remarquer Salter. Les noirs américains présentent un front uni contre ces discriminations notoires, la brutalité policière, les crimes abominables et la peine de mort.
George Barna note aussi qu'un certain nombre de clichés sur les blacks n'ont plus lieu d'être chez les blancs. «Pour beaucoup de blancs, les perspectives des blacks n'ont aucun sens,», dit-il. «Etre heureux malgré une forte proportion de familles monoparentales, se suffire de revenus financiers limités et se déclarer heureux tout en étant exclu des plus hautes fonctions gouvernementales et des commandes de l'Amérique n'a pas de sens pour la grande majorité des blancs. Mais ce que la majorité de blancs ne comprennent pas, c'est que les noirs américains conçoivent leur vie selon des présupposés diamétralement différents», dit-elle. «Cette confusion explique pourquoi tous les efforts de réconciliation ont échoué dans notre pays. Les blancs cherchent à réconcilier les uns et les autres en fonction de leur point de vue de blancs et de leur conception de vie.» Les deux races agissent en fonction de points de vue différents et à partir de réalités différentes, estime Magee.
>Source: UMNS