Sous la plume de TANGI SALAÜN, le quotidien français Le Figaro relate le drame d’un Égyptien menacé de mort après sa conversion au christianisme. Son cas n’est pas isolé de par le monde, comme le relatait déjà en son temps l’autre quotidien français, le Monde, à propos de cette malaisienne Liliane Loy, dont la vie est aussi menacée à ce jour après son passage de l’islam au christianisme*.
Le jeune homme voulait officialiser son changement de religion sur ses papiers d’identité. Considéré comme apostat, il vit dans la clandestinité après avoir reçu des menaces de mort de la part d’extrémistes musulmans.
MOHAMED HEGAZI a peur. Ce jeune homme de 25 ans, né musulman mais qui dit s’être converti au christianisme il y a neuf ans, a transgressé un tabou absolu en demandant que ses papiers d’identité mentionnent sa nouvelle religion. Son initiative, sans précédent, a soulevé un tollé en Égypte, où l’immense majorité des dignitaires musulmans s’accorde à dire que l’islam ne permet pas de changer de religion. Considéré comme apostat, Hegazi, qui était jusqu’à il y a peu représentant du mouvement d’opposition civile Kefaya (Ça suffit?!) à Port-Saïd, craint aujourd’hui pour sa vie et affirme se cacher avec son épouse, qui serait elle aussi convertie. «Je reçois des menaces de mort sur mon téléphone portable. À chaque fois que je change de numéro, des fanatiques l’obtiennent et m’appellent en menaçant de me liquider» , raconte l’infortuné. «Le danger ne vient pas seulement des extrémistes, un citoyen ordinaire pourrait me tuer de son propre chef, convaincu d’avoir ainsi servi l’islam», dit-il. Pour les plus radicaux, une déclaration d’apostasie équivaut, de fait, à une condamnation à mort. Dans les années 1990, période noire de l’islamisme armé en Égypte, l’écrivain et journaliste Farag Foda a payé de sa vie une telle accusation. Le Prix Nobel de littérature, Naguib Mahfouz, a échappé de peu au poignard d’un illuminé. L’universitaire Nasr Abou Zeid a dû se réfugier aux Pays-Bas après avoir été condamné par la justice à divorcer de sa femme, une sanction automatique pour les apostats. Depuis que l’affaire Hegazi défraye la chronique, pas un jour ou presque ne passe sans que la presse cairote ne répercute des déclarations haineuses et intolérantes. Ainsi du quotidien gouvernemental Al-Messa, qui affirme que selon un «sondage» réalisé par ses soins, tous les oulémas sont unanimes sur la «nécessité de tuer l’apostat» ?: un verdict lapidaire clairement destiné à contredire le grand mufti d’Égypte, qui a récemment affirmé que les hommes n’ont pas à se substituer à Dieu pour faire justice (lire ci-dessous). Dans la même veine, le beau-père de Mohamed Hegazi a confié à la presse égyptienne qu’il souhaitait que la justice contraigne sa fille à divorcer et «qu’elle soit ramenée chez (lui), même morte». Quant au père du jeune activiste, il soutient que son fils continue de prier à la mosquée avec lui.
Pressions de l’Église copte orthodoxe
Nouvelle escalade cette semaine: deux membres de l’Organisation des chrétiens du Proche-Orient (Meca), Adel Fawzi et Peter Ezzat, ont été incarcérés pour «atteinte à l’islam» et «sédition confessionnelle». Selon le quotidien indépendant Al-Masri al-Yom, les deux hommes, qui collaborent à un site Internet copte dénonçant les persécutions dont les chrétiens se disent victimes en Égypte, ont été arrêtés en possession de pamphlets et de vidéo jugées anti-islamiques. Mais surtout, croit savoir le journal, ils auraient joué un rôle dans la conversion de Mohamed Hegazi. L’affaire a pris de telles proportions qu’une organisation non gouvernementale (ONG) copte, le centre al-Kadima pour les droits de l’homme, a retiré la semaine dernière la plainte qu’elle avait déposée au nom de Mohamed Hegazi devant la justice administrative, après que les services de l’état civil ont refusé d’inscrire le christianisme sur sa nouvelle carte d’identité. En Égypte, ce document mentionne obligatoirement la religion. Mamdouh Nakla, le directeur d’al-Kadima, a affirmé que sa décision avait été uniquement motivée par «l’absence de certificat de conversion de l’Église». Mais selon des sources religieuses, l’Église copte orthodoxe a exercé des pressions sur l’ONG, de peur d’être accusée de prosélytisme. «L’Église sait que le cas Hegazi est très sensible», souligne un connaisseur du dossier. «Il est possible qu’elle ait choisi de rester en retrait dans cette affaire pour ne pas s’attirer d’ennuis, mais aussi dans l’espoir d’obtenir en retour des avancées sur la question des chrétiens convertis à l’islam et qui veulent revenir au christianisme, pour lesquels elle n’a pas hésité à monter au créneau ces dernières années.» Pendant ce temps, Hegazi se terre, seul face à son choix.
le 17 août 2007
Source: Le Figaro