«Quand le président Lula déclare s'être fixé pour objectif qu'à la fin de son mandat il n'y ait plus au Brésil un seul enfant qui s'endorme en ayant faim, il fait oeuvre d'évangélisation», a affirmé l'évêque Federico Pagura de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) d'Argentine, qui présentait son témoignage dans le cadre du Troisième Forum social mondial tenu à Porto Alegre, Brésil.
Lors d'une réunion tenue le 27 janvier, l'évêque Pagura, membre du Collège des présidents du Conseil oecuménique des Eglises, s'est exprimé en tant que chrétien engagé en faveur des causes populaires. Il a soutenu son affirmation en reprenant la thèse du prêtre uruguayen Luis Pérez Aguirre qui disait qu'en Amérique latine l'annonce de l'Evangile passe, en premier lieu, «par un tube d'environ huit mètres de long qu'on nomme appareil digestif».
Cela n'a pas été la seule affirmation engagée de cet Argentin qui fêtera ses 80 ans en mars prochain et qui se déclare descendant d'Italiens, avec quelques gouttes de sang indien dans les veines. «L'Européen et l'Indien qui sont en moi se livrent une bataille qui n'est pas terminée, mais je crois que c'est l'Indien qui va gagner», a-t-il déclaré.
Présenté par Geneviève Jacques, directrice des programmes du COE, comme «une des voix prophétiques de l'Amérique latine», l'évêque Pagura a commencé son témoignage en rappelant à son nombreux auditoire qu'il venait de la ville de Rosario, «berceau de ce patriote, médecin et révolutionnaire latino-américain qui s'appelait Ernesto Che Gevara».
Federico Pagura n'a pas caché ses sympathies pour le Brésil. «J'ai suivi avec intérêt la marche du Mouvement des sans-terre, la progression du Parti des travailleurs, le long cheminement du mouvement oecuménique brésilien, qui est parmi les plus vivants et les plus dynamiques et, plus récemment, le développement du Forum social mondial qui commence à éclipser le Forum économique mondial de Davos.»
Le Forum social mondial est «un symbole précieux de cet autre monde possible pour lequel nous luttons», a affirmé l'évêque, se référant ainsi au slogan du Forum. Et pendant que dans le Nord, Davos et Washington proposent de nouvelles formes d'exploitation et une guerre insensée, dans le Sud, la population de pays comme l'Argentine, le Brésil, l'Equateur ou Cuba démontre «qu'elle manque de tout, sauf de dignité» comme le dit, à propos de Cuba, l'écrivain Uruguayen Eduardo Galeano.
Parlant de l'Argentine, Federico Pagura a fustigé les «gourous» de l'économie qui, en promettant de faire passer le pays dans le «premier monde» grâce à leurs remèdes miraculeux, ont gravement trompé les Argentins. «Venez visiter mon pays», a ajouté l'évêque, «et les larmes vous monteront aux yeux».
Federico Pagura a mentionné aussi d'autres noms dans son témoignage, tels ceux de Martin Luther King et d'Oscar Arnulfo Romero, «figures inspiratrices qui proclamaient un message de vie et d'espérance, sans jamais le séparer de la nécessité de transformer les conditions de vie de leur peuple». Le souvenir de ces deux personnalités lui a permis de renouveler son espérance et de nourrir la foi qui l'a soutenu dans les moments les plus difficiles de sa vie.
«Tous deux ont indiqué aux Eglises la voie à suivre si elles veulent être fidèles à leur mission», a conclu l'évêque Pagura.
La délégation oecuménique parrainée par le COE travaille dans le cadre du «comité oecuménique» mis en place par le COE, la Fédération luthérienne mondiale, l'Alliance oecuménique «agir ensemble», le Conseil des Eglises d'Amérique latine et une coalition oecuménique d'Eglises brésiliennes et d'organisations qui leur sont liées.
Les membres de la délégation animent une série d'ateliers qui établissent des liens entre la foi chrétienne et certaines formes de résistance à un ordre mondial injuste exercées par les Eglises et les organisations oecuméniques et sociales.
30 janvier 2003
Source: Conseil oecuménique des Eglises (COE)