La presse réformée a considéré comme "clarifiée" la position de l'Evêque Henri Bolleter, de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM), par rapport au document du Vatican "Dominus Jesus" (cf. EEMNI du 8.9.2000). Récemment l'Evêque catholique-romain Kurt Koch s'est également exprimé à propos du dialogue oecuménique dans le cadre d'une interview réalisée par Benno Buehlmann et Toni Greber, et publiée dans le "Neue Luzerner Zeitung" du 22 Septembre. A cette occasion, il a fait référence aux propos de l'évêque Bolleter. Voici quelques extraits de cette interview:
- "Vous décrivez ce document du Vatican comme étant un aiguillon pour le dialogue oecuménique. On a cependant l'impression que cette publication a plutôt eu l'effet contraire.
Kurt Koch: Ce document contient une évidence on ne peut plus claire pour l'église catholique, car il souligne que l'Eglise de Jésus-Christ prend corps dans l'église catholique-romaine. Une telle évidence fourni l'hypothèse à partir de laquelle le dialogue peut être engagé. Jusqu'à maintenant les protestants et les catholiques n'avaient pas encore réussi a engager un dialogue à propos des différences fondamentales entre leurs compréhensions respectives de l'Eglise. "Dominus Jesus" pourrait maintenant encourager les protestants à exprimer de façon tout aussi claire quelle est leur compréhension de l'Eglise, afin de pouvoir avancer sur ces questions fondamentales.
- Ce document est donc quasiment la rupture d'un tabou. Pour la première fois l'Eglise Catholique répond à des questions qui jusqu'à maintenant étaient évitées.
Kurt Koch: Non, justement pas. Cette évidence de l'Eglise Catholique Romaine est exprimée clairement depuis le concile. Mais dans le dialogue oecuménique, et principalement en Suisse, on a continué a éviter ces questions.
- Comment doivent donc réagir les protestants lorsque l'Eglise Catholique-Romaine dit d'elle qu'elle est la vraie église?
Kurt Koch: Je m'attendrais en fait à ce que les réformés déclarent que l'Eglise de Jésus-Christ prend également corps dans leurs églises, et qu'ils disent quels sont leurs critères. A partir de là, on pourrait aborder les questions qui nous mènent plus loin.
- Comment l'Eglise Catholique réagirait-elle si les réformés prenaient position de façon si peu consensuelle?
Kurt Koch: Le théologien évangélique Eberhard Juengel a souligné, dans un exposé approfondi relatif au document du Vatican, que les différences sont bien plus profondes qu'on ne le dit ouvertement. Je considère que cette observation est importante, car elle nous met au défi, nous catholiques, d'approfondir le dialogue oecuménique.
- Cela ne nous aide guère, alors que beaucoup disent que ce document du Vatican est plutôt blessant que stimulant pour le dialogue.
Kurt Koch: Le but de ce document n'était vraiment pas de blesser qui que ce soit. Le problème est sans doute dû au fait que ce document a abordé certains sujets épineux et qu'une partie des réformés s'est sentie blessée. Je le regrette. Dans le même temps, je dois cependant faire remarquer qu'il y a aussi dans les églises réformées de Suisse certaines affaires qui m'attristent.
- Par exemple?
Kurt Koch : Lorsque des Eglises Réformées d'Etat déclarent que le baptême n'est pas un préalable indispensable à la participation à la Cène, c'est pour moi une atteinte au corps de l'Eglise, car tout l'oecuménisme repose sur la reconnaissance mutuelle des baptêmes. Ou bien lorsqu'un conseil synodal veut, sans nous consulter préalablement, publier un document expliquant comment on célèbre la Cène en commun avec les prêtres catholiques-romains, c'est une façon de procéder que je ne peux pas décrire comme correcte du point de vue oecuménique.
- Pourquoi exprimez-vous ces critiques seulement maintenant?
Kurt Koch: Jusqu'à maintenant, j'ai toujours pensé que de tels problèmes devaient être réglés directement avec les intéressés. D'un autre côté, l'idée en vogue actuellement, selon laquelle les entraves à l'oecuménisme ne viendraient que de l'Eglise Catholique, doit être corrigée. Elle ne correspond pas à la réalité telle que je la perçoit.
- Est ce que le dialogue n'est pas automatiquement rendu plus difficile lorsqu'un côté définit ses propres évidences ?
Kurt Koch : Naturellement. Ce document peut effrayer, car il résulte d'une logique pointilleuse. Il est néanmoins intéressant de constater qu'il n'effraie pas tous les protestants. En effet, l'Evêque Méthodiste a réagit tout à fait différemment et déclaré que le contenu essentiel du document était en fait connu depuis le concile."
>Source: EMKNI et la «Neue Luzerner Zeitung»