Communiqué de l’Alliance évangélique européenne sur l’actuelle « crise des réfugiés » et les réactions du monde évangélique
Tandis que le sang innocent se répand et que des personnes sont privées de leurs droits en Irak, en Syrie et de nombreux autres endroits du monde, que faisons-nous ? Les causes profondes de la crise au Moyen- Orient demeurent sans réponse adéquate, et une crise humanitaire aux proportions bibliques pousse des centaines de milliers de familles et d’individus à fuir leurs contrées d’origine.
Un important travail humanitaire se déroule au Moyen-Orient, où la plupart de la crise et les deux tiers des personnes déplacées se trouvent. Il est de notre devoir moral de soutenir de toute urgence le travail des nombreuses organisations et agences qui y ont répondu, par la prévention des conflits, le travail humanitaire et la consolidation de la paix dans la région depuis de nombreuses années, et plus généralement dans les pays d’origine des réfugiés ; des acteurs qui n’ont de cesse de nous sensibiliser.
Qu’en est-il en Europe ? Avec des stations de transit pour les migrants en Hongrie, du secours d’urgence en Serbie et en Croatie, du plaidoyer politique en Slovaquie, ou de la sensibilisation pour préparer les Églises et les familles à accueillir et héberger des migrants en Scandinavie et au Royaume-Uni ; avec de l’assistance juridique, des cours de langue et du soutien spirituel ou encore des centres de jour pour les migrants et leurs familles en Italie, l’Alliance évangélique européenne (AEE) regarde avec fierté et humilité la réponse significative et croissante des chrétiens évangéliques d’Europe, de toutes les traditions.
Certains organismes embauchent de nouveaux employés pour faire face à la crise et, avec les alliances évangéliques nationales, s’efforcent de mobiliser l’Église, en créant des groupes de travail nationaux spéciaux, comme en Italie, en Suisse ou en Allemagne. Des organisations évangéliques au Royaume-Uni, en Belgique, en Allemagne et aux Pays-Bas soutiennent sur les plans financier et opérationnel les efforts au Moyen-Orient et dans les pays de transit tels que la Turquie ou encore en Grèce, où les travailleurs et bénévoles chrétiens grecs aident à l’assainissement, aux soins de santé et à la rénovation de centres d’accueil.
Ce ne sont là que quelques exemples de la réponse des évangéliques à la crise.
Selon une base de données établie par l’AEE, au moins 30 ONG et organismes nationaux ou internationaux évangéliques, y compris de nombreuses alliances évangéliques, sans compter d’innombrables alliances locales, associations et Églises, communautés et simples groupes de bénévoles, sont mobilisés pour répondre à la crise. Ce travail totalise probablement plusieurs milliers de collaborateurs et bénévoles évangéliques en plus du travail important qui existe déjà en faveur des personnes en situation de pauvreté ou de besoin en Europe, prodigué indépendamment des conceptions du monde ou des convictions des personnes.
La migration est intrinsèque au fait d’être humain, ce qui peut nous conduire à nous demander pourquoi la crise humanitaire et des réfugiés actuelle devrait être appelée une « crise des migrants » en tant que telle. C’est le manque d’alternatives viables qui pousse des femmes, enfants et hommes déracinés à prendre le risque de traverser les déserts et les mers pour se réfugier dans l’Union européenne (UE) et d’autres pays industrialisés. Bien que nous ne soyons pas en mesure de trouver des solutions immédiates à la crise des réfugiés, nous n’avons d’autre choix que d’aider là où nous le pouvons. La Justice et la compassion doivent être à la source et façonner notre réponse.
Jusqu’à présent en 2015, la majorité des migrants atteignant l’Europe sont venus de Syrie, d’Afghanistan, d’Érythrée, du Nigeria et de Somalie. La guerre et la violence, des États défaillants, un terrorisme rampant et l’oppression sont des réalités bien connues dans ces pays d’origine. Bien que régulièrement dépeints comme des « migrants économiques » par les médias et les politiciens, il ne fait guère de doute que majorité de ces personnes sont des migrants forcés et en besoin de refuge.
En effet, la crise actuelle ne doit pas cacher le défi plus large de la migration et les politiques qui s’y rapportent. Inspirées par l’éthique tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, nos convictions protestantes évangéliques affirment que l’approche de l’asile et de la migration ne peut d’abord être une question de sécurité de défense. Les migrants ne peuvent pas être considérés comme des ennemis ou des envahisseurs, mais des humains avant tout. Les chrétiens sont appelés à une éthique de Justice, de compassion et d’intégration de l’étranger, et surtout de protection des personnes vulnérables. Nous croyons que ces valeurs sont universelles ; que les gouvernements et tous les individus doivent défendre la Justice, en refusant d’écouter les sirènes de la démagogie, du populisme et de la xénophobie.
La Bible, notre autorité suprême en matière de foi et de conduite, porte de multiples récits de migration, notamment des demandes à des dirigeants politiques de pouvoir traverser un territoire en sécurité, ce qui fut accordé au nom de la Justice (Deutéronome 2). La Bible affirme que Dieu «entend» le sang des innocents “crier” à lui et le cri de personnes en raison de leurs oppresseurs, que ces innocents soient chez eux ou émigrés (p.ex. Genèse 4 : 10, 9 : 5-6, Exode 3, Deutéronome 21). À ce titre, certains des mots les plus puissants de Jésus résonnent de façon poignante, lui qui s’identifie avec les plus démunis. Notre passion de servir Dieu avec adoration devrait donc ne conduire à aucune hésitation à faire du bien aux gens en besoin de soutien et d’hébergement (voir Matthieu 4 & 5 ou Luc 10 : 25-37). Nous sommes appelés à suivre le chemin de Jésus, la charité sacrificielle (1 Pierre 2 : 21-25).
Les solutions à long terme portant sur l’immigration croissante impliquent des considérations politiques difficiles, y compris des questions telles que l’emploi, le logement et l’éducation. L’appel biblique à aider ceux dans le besoin ne fournit pas une réponse complète à la question de savoir comment l’UE ou bien tel ou tel pays doivent concevoir leurs politiques migratoires. Sur ce sujet, les chrétiens arrivent à des conclusions différentes, veillant à ce que celles-ci soient compatibles avec l’éthique biblique. La diabolisation ou la glorification politiques de différents points de vue engendrent des polarisations plutôt qu’un débat public constructif. Bien que les considérations d’une juste politique d’aide aux réfugiés soient difficiles, l’Église chrétienne a la responsabilité morale d’accueillir et aider ceux qui en ont besoin, indépendamment de leur conception du monde ou leurs convictions.
Nous ne pouvons pas nous laisser gouverner par la peur, l’émotion pure et simple ou naïveté. Par conséquent, nous prions avec ferveur pour que la volonté de Dieu soit faite sur la terre comme elle l’est au ciel. Les Églises doivent être unies dans leur service compassionnel envers le Christ, et les chrétiens doivent voir cette réponse à la crise comme une opportunité de grandir ensemble en tant que disciples de Jésus. Nous revendiquons que la Justice et la compassion guident les décisions de nos dirigeants politiques et que les Églises évangéliques de toutes les contrées européennes soient exemplaires, unies et prophétiques dans leurs actions et leur plaidoyer au nom du bien commun.
- Pour informer l’AEE à propos de votre travail : office@europeanea.org
- À propos du travail au Moyen-Orient et comment le soutenir : Integral Alliance, EU-CORD
- Accueillir et aider les réfugiés : #WeWelcomeRefugees, Home for Good (Royaume-Uni)
- Autres requêtes : office@europeanea.org, brussels@europeanea.org
Version française fournie par le CNEF, relais en France de l’Alliance évangélique européenne
23 septembre 2015
CNEF