En septembre 1999 se tenait à Strasbourg le Colloque des facultés de théologie protestante des pays latins. Il portait sur la ou les spiritualités émergeant du protestantisme. Le pasteur Louis Schweitzer, anciennement Secrétaire Général de la Fédération Protestante de France et présentement directeur de l'Ecole Pastorale à Massy (Fédération des Eglises Evangéliques Baptistes), en était un des intervenants. Le dernier numéro des cahiers de l'école pastorale reprend entre autres la contribution de Louis Schweitzer à ce colloque. Dans cet article, il prête attention aux différentes spiritualités que protestantisme a générées et tente de réfléchir à la façon dont elles assument la modernité. Louis Schweitzer décrit les grands axes de spiritualités les uns après les autres,: après la lignée «orthodoxe», il passe en revue la lignée «libérale» avant d'en venir à la lignée du réveil. Et tout naturellement à côté du courant piétiste et mystique, Louis Schweitzer s'attarde au méthodisme initié par John Wesley. Voici ce qu'il en rapporte:
«Le troisième axe que nous pourrons déterminer est lui aussi issu, dans un premier temps, d'une réaction à une orthodoxie perçue comme sèche et théorique. Le piétisme, qui commence au 17ème siècle, se veut avant tout un retour à l'expérience initiale de la Réforme. Il est également, comme le montrent les «pia desideria» de Spener, une réappropriation de la tradition spirituelle de l'Eglise universelle, des pères de l'Eglise comme de l'imitation de Jésus-Christ. L'accent est mis sur une spiritualité du coeur, sur la relation personnelle du croyant avec son Dieu. Il s'agit avant tout d'avoir une vie transformée par I'oeuvre de l'Esprit. Pour cela, la méditation savoureuse de l'Écriture doit être accompagnée d'échanges spirituels en petits groupes au cours desquels le partage d'expériences vient enrichir notre propre chemin. Ce grand mouvement fécondera l'ensemble du protestantisme de langue allemande mais se répandra, en particulier grâce à l'influence des moraves, au delà de son berceau culturel luthérien. Le méthodisme de John Wesley apportera cette sensibilité spirituelle dans les milieux de langue anglaise. L'accent de cette prédication universelle de l'Évangile, souvent en plein air, porte sur l'appel à la conversion qui est ouverture à l'Esprit en vue de la repentance et de la nouvelle naissance ainsi que sur une prédication renouvelée de la sanctification. On trouvera dans le message de Wesley, comme dans les ouvrages qu'il recommandait aux animateurs du réveil, une influence catholique: l'imitation de Jésus-Christ, Saint François de Sales, Renty, Fénelon, et d'autres dont le frère Laurent de la Résurrection. Le grand réveil américain, ainsi que le réveil continental européen marqueront toutes les Églises, leur donnant un accent nouveau sur l'expérience spirituelle et un dynamisme évangélisateur, au risque parfois de susciter des scissions. Malgré son extrême diversité, la spiritualité du mouvement évangélique est, pour une immense part, l'héritière de cette grande lignée du réveil...»
>Source: Les Cahiers de l'Ecole Pastorale N°35 mars 2000