Lutte contre l’exclusion par le logement

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Lettre du Conseil national de l'ERF (3 juillet 2011)


LETTRE DE LAURENT SCHLUMBERGER Pasteur, président du Conseil national  de l’Eglise Réformée de France



À M. Benoist Apparu, 

Secrétaire d'Etat au logement. 

Monsieur le Secrétaire d'Etat. 

Depuis bien des villes de France ces temps-ci, militants associatifs, fonctionnaires des services concernés, travailleurs sociaux et simples citoyens attirent notre attention sur la remise à la rue de personnes précédemment accueillies dans des hébergements d'urgence. A un moment où les conditions climatiques et l'ambiance estivale en amenuisent l'impact social et médiatique, ces remises à la rue ont parfois concerné des familles entières, y compris des femmes seules avec des enfants, voire avec des bébés âgés de quelques jours seulement. 

La baisse des subventions ou le retard croissant de leur paiement, la déficience de la prise en charge directe par l'Etat du fait du financement insuffisant de structures telles que le Samu social, sont la cause immédiate de cette situation. Le Collectif des associations unies pour une nouvelle politique publique du logement des personnes sans abri et mal logées a de nouveau dénoncé cette logique, il y a trois jours dans vos bureaux . 

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Chaque être humain, en particulier dans les premiers jours de son existence mais aussi tout au long de celle-ci, a besoin d'être inconditionnellement accueilli et reconnu par ses semblables pour pouvoir vivre. Ce devoir d'hospitalité et de vigilance incombe à chacun comme à la collectivité. Lorsque l'insuffisance des moyens affectifs, culturels et économiques mettent cette hospitalité minimale en danger, il est de la responsabilité des instances politiques élues d'organiser sa prise en charge. En France, cette responsabilité relève de manière ultime de l'Etat. 


L'Eglise réformée de France est liée à plusieurs des associations du Collectif des associations unies (Centre d'action sociale protestant, Collectif Les morts de la rue, Fédération de l'Entraide protestante, Fondation de l'Armée du Salut, etc.), soit parce qu'elles sont directement issues de ses rangs, soit par l'engagement de ses membres, soit par des partenariats et des compagnonnages souvent de longue date. Elle a rappelé dans ses synodes récents combien son engagement social devant la précarité et l'exclusion -ce qu'elle appelle en termes théologiques la « diaconie » - est non seulement attention compassionnelle mais aussi « pratique de libération et exigence de justice ». 

C'est à ce double titre que le conseil national de l'Eglise réformée de France, réuni aujourd'hui, vous fait part de sa vive préoccupation devant les effets inacceptables de choix politiques qui aboutissent à étrangler les moyens dont doivent pouvoir bénéficier les personnes les plus faibles et fragiles de notre société, et demande au gouvernement d'honorer ses engagements en matière de logement social et d'hébergement d'urgence. 

Par ailleurs, le conseil national apporte son soutien aux démarches entreprises par le Collectif des associations unies. Il encourage, dans le prolongement des décisions du Synode national de 2010, les communautés locales de l'Eglise réformée de France, qui agissent par leur propres services de diaconie ou par des associations sœurs, dans leur effort de vigilance, d'action et de prière. 

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Secrétaire d'Etat, l'assurance de ma haute considération.  L.S.

Paris, le 3 juillet 2011.



Communiqué du Collectif (29 juin 2011)


Lutte contre l’exclusion par le logement : colère des associations

Trois ans après l’annonce par François Fillon d’un grand « Chantier national prioritaire pour le logement », l’accès au logement des personnes sans abri et mal logées n’est toujours pas une priorité. Les associations du Collectif manifeste leur colère.

Paris, le 29 juin 2011

LE MEPRIS

Trois ans après l’annonce par François Fillon d’un grand « Chantier national prioritaire pour le logement », l’accès au logement des personnes sans abri et mal logées n’est toujours pas une priorité. Le Premier ministre s’était engagé à revoir les associations du Collectif (qui rassemble les principaux acteurs associatifs de la lutte contre l’exclusion par le logement), suite à leur mobilisation sur le Pont des Arts en novembre 2010. A la veille de l’été, elles n’ont pas été reçues. Même silence du Président de la République, qui n’a guère donné suite à notre demande de rencontre en janvier 2011…

Face au mépris des plus hautes instances de l’Etat envers toutes les situations d’exclusion et de détresse sociale qui ne sont pas prises en charge, les associations veulent exprimer leur colère !

Elles ont vu se multiplier, ces dernières semaines, des mesures d’une grande brutalité :

-         Fermeture de places d’hébergement et d’hôtel, sans qu’aucune solution ne soit proposée aux personnes. Ces fermetures sont la conséquence de réductions budgétaires inacceptables en 2011 (- 41 millions d’€) et qui pourraient se poursuivre en 2012 (annonce d’une diminution de 64 millions d’€). Sachant que l’Etat fait lui-même le diagnostic d’un manque de places d’hébergement (ex : déficit de 13 000 places en Ile-de-France) sans vouloir en créer de nouvelles ;

-         Remises en cause frontales du principe d’accueil inconditionnel pour les publics migrants et demandeurs d’asile. Alors que les capacités des Centres d’Accueil pour Demandeurs d’Asile (CADA) sont notoirement insuffisantes (seulement 37% des demandeurs d’asile présents sur le territoire au 1er janvier 2010 ont été pris en charge), les restrictions budgétaires sur le dispositif d’accueil d’urgence remettent en cause le devoir d’accueil inconditionnel. Le Collectif dénonce les décisions discriminatoires de certaines préfectures (Calvados, Haut-Rhin, Vienne, Yonne, Moselle…) qui demandent aux associations de remettre à la rue les personnes migrantes, qui sont pourtant parmi les plus vulnérables ;

-         Fragilisation extrême du secteur associatif, déjà fortement pressurisé. Ces coupes budgétaires exposent les associations à des difficultés croissantes pour venir en aide aux personnes qu’elles accueillent. La multiplication sur tout le territoire des annonces de licenciements et/ou de fermetures de structures montre qu’une nouvelle étape est franchie.

Les associations du Collectif ont été invitées à participer à un énième rendez-vous, jeudi 30 juin, avec le secrétaire d’Etat au Logement dans le cadre de la Refondation (réforme du dispositif d’hébergement et de l’accès au logement lancée en 2009). Alors qu’elles ont joué le jeu du dialogue depuis deux ans, elles craignent que cette rencontre, comme les précédentes, soit en déconnexion totale avec les réalités de terrain et n’aboutisse à rien de concret (ex : toujours pas de perspective pour sortir de la gestion saisonnière de l’hébergement pour l’hiver 2011-2012, alors que la Refondation devait déjà régler ce problème pour l’hiver dernier).

Quelles perspectives pour la Refondation et sa logique du « logement d’abord », en l’absence d’une offre de logements suffisante et accessible, notamment dans les zones les plus tendues ? Rappelons que plus de 3.5 millions de personnes sont non ou mal-logées en France, et plus de 18 700 ménages prioritaires dans le cadre du Dalo n’ont pas été relogés par les préfets au-delà du délai légal. Les orientations actuelles de la politique du logement ne font que renforcer nos inquiétudes : désengagement de l’Etat sur le budget des aides à la pierre et sur celui de l’Anah, remise en cause du conventionnement social dans le parc privé, politique de prévention des expulsions locatives au point mort…

 

Le Collectif des associations demande aujourd’hui au Gouvernement un engagement extrêmement fort, à travers des moyens financiers suffisants pour faire face à la crise sociale majeure que nous traversons.

 

Les associations membres du Collectif

 Advocacy France,
Association des Cités du Secours Catholique,
Association Emmaüs,
Association Nationale des Compagnons Bâtisseurs,
ATD Quart Monde,
Centre d’action sociale protestant (CASP),
Collectif Jeudi noir,
Collectif Les Morts de la Rue,
Comité des Sans Logis,
Croix-Rouge française,
Emmaüs France,
Enfants de Don Quichotte,
Fédération d’aide à la santé mentale Croix marine,
Fédération des Associations pour la Promotion et l'Insertion par le Logement (FAPIL),
Fédération de l’Entraide Protestante,
Fédération Française des Equipes Saint-Vincent,
Fédération des Pact,
Fédération nationale Habitat & Développement,
Fédération Nationale des Associations d’Accueil et de Réinsertion Sociale (FNARS),
Fédération Nationale des Associations Solidaires d’Action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (FNASAT-Gens du voyage),
Fondation Abbé Pierre,
Fondation de l’Armée du Salut,
France Terre d’Asile,
Les petits frères des Pauvres,
Ligue des Droits de l’Homme,
Médecins du Monde,
Secours Catholique,
Union Nationale des Amis et des Familles de Malades Psychiques (UNAFAM),
Union des professionnels de l'hébergement social (UNAFO),
Union Nationale des Comités Locaux pour le Logement Autonome des Jeunes (UNCCLAJ),
Union Nationale pour l’Habitat des Jeunes (UNHAJ),
Union Nationale Interfédérale des Œuvres et Organismes Privés Sanitaires et Sociaux (UNIOPSS).


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