Linda Worthington s'est rendue en vacances au Cambodge au début de janvier et y a visité des églises locales. Elle fait partie de l'équipe chargée de la communication au sein de la Conférence annuelle Baltimore-Washington et écrit pour le journal UMConnection.
Par Linda Worthington
Cahotant sur des routes poussiéreuses dans son camion tout-terrain, le pasteur Joseph Chan s'est rendu à l'Eglise de Siem Rap. La plupart des 30 membres de la communauté sont venus à pied des champs voisins, se protégeant de la poussière tournoyant autour de leur visage, pour participer au culte dominical.
Chan et sa femme, Marylin Sovann Chan, sont des chrétiens cambodgiens, envoyés par la Commission mission et diaconie de l'Eglise en qualité de missionnaires auprès de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) cambodgienne, qui connaît une croissance très rapide. Les Chan sont souvent au Centre Méthodiste à Phnom Penh, mais en ce deuxième dimanche de la nouvelle année, ils étaient à Siem Reap, voisine des légendaires ruines archéologiques indo-bouddhistes d'Angkor. En sa qualité de directeur du développement local de l'Eglise, M. Chan voulait voir le projet agricole et de développement communautaire géré par la paroisse.
Quelque 80 enfants venaient de terminer l'école du dimanche, juste avant le culte, dans l'Eglise Evangélique Méthodiste Khnar Thmei. Ils avaient occupé les salles de classe de l'annexe et les deux pièces adjacentes à la chapelle. Mme Chan, qui s'occupe d'éducation chrétienne, raconte que deux semaines plus tôt, à Noël, plus de 200 enfants, pauvres pour la plupart et venus des quartiers environnants, avaient rempli la cour pour un repas et une fête.
A l'aide d'un tambour et d'une guitare, Thom Sinath, l'un des trois moniteurs d'école du dimanche de Siem Reap, animait les chants pendant le culte. Le pasteur local Sem Sokha a apporté un message sur Jésus, la lumière du monde, commentant brièvement des passages bibliques se référant à la lumière. Un des grands moments du culte fut la première, par Sinath et quatre autres, d'une grâcieuse danse cambodgienne de style classique, exécutée sur un hymne composé par des membres de la communauté pour accueillir des visiteurs.
Sinath a suivi l'école pendant 10 ans, mais a dû interrompre sa scolarité pour aider sa famille, qui fait partie des 40 pour cents de la population vivant au dessous de la limite de la pauvreté, fixée à 11 dollars par personne et par mois. Elle rêve de pouvoir entrer à l'Ecole biblique méthodiste, à Phnom Penh.
L'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) du Cambodge, en collaboration avec d'autres Eglises Méthodistes autonomes, tente de répandre l'évangile et d'aider le pays à poursuivre son redressement après les années de guerre et d'oppression. De 1975 à 1979, quand Pol Pot et les Khmers rouges gouvernaient le pays, quelque 2 millions de Cambodgiens sont morts, victimes de privations, de brutalités et d'exécutions.
Un défi en matière de formation
L'Eglise est confrontée à un défi majeur, qui est de trouver et former des moniteurs pour les enfants avides d'apprendre qui fréquentent l'école du dimanche partout dans le pays. La moitié des 11 millions de Cambodgiens sont nés depuis la chute de Pol Pot en 1979, et un quart de la population a moins de 16 ans.
La formation est une des tâches principales de la mission évangélique méthodiste à Phnom Penh. C'est là que Ariel D. Collins, une missionnaire de la Commission mission et diaconie, prépare du matériel didactique pour la formation des moniteurs d'école du dimanche. Et quand elle développe la matière des cours, elle est consciente de ce que la plupart des moniteurs n'ont pas de formation de base et que le Cambodge connaît un fort taux d'analphabétisme. Elle collabore avec Then Yeth, une artiste dont les peintures illustrent les séries de brochures produites par l'Eglise.
Mme Chan se concentre sur la distribution de ce matériel dans les églises locales. La plupart des églises et des écoles du dimanche offrent également des cours élémentaires de lecture, puisque seuls 10 pour cents des enfants de la campagne et 50 pour cents des enfants des villes fréquentent l'école. Le dimanche après-midi, une charpente avec toit de tôle, sans paroi - la "sala" du projet communautaire de Siem Reap - abrite une classe de lecture, ainsi qu'un culte animé par le pasteur Sokha. A l'avenir, explique Mme Chan, ce sera aussi la "salle de classe" des cours de formation professionnelle.
L'Ecole biblique méthodiste du Cambodge, fondée il y a quatre ans, compte 45 étudiants, hommes et femmes, âgés de 20 à 55 ans. L'Ecole admet 25 étudiants par an, qui suivront un programme de trois ans. Les étudiants sont censés avoir le baccalauréat, mais certains, qui ont atteint des résultats particulièrement bons lors des examens préalables ou des entretiens d'admission, peuvent avoir un niveau plus bas, explique le pasteur Michael W. Collins, qui travaille avec l'Association chrétienne méthodiste du Cambodge et est directeur de la mission évangélique méthodiste au Cambodge. L'Association finance deux instructeurs à plein temps.
Le pasteur Collins précise qu'aucune des 90 Eglises Méthodistes du Cambodge n'a de pasteur ordonné. Tous sont des pasteurs locaux; la plupart d'entre eux n'ont pas le baccalauréat. Tous les trois mois, ils arrivent de leurs paroisses disséminées sur toute l'étendue du pays, pour une formation au ministère paroissial, à la prédication, en théologie, à la connaissance de la Bible et à l'évangélisation. L'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) subventionne la formation de ces pasteurs et fournit les transports, le logement et les repas au Centre pendant la durée de leur séjour à Phnom Penh. Le salaire de ces pasteurs consiste en ce que leurs communautés peuvent leur donner.
M. Chan qui a obtenu une licence universitaire et fréquenté une Ecole biblique aux Etats Unis, n'est pas ordonné. Il espère l'être un jour.
Partenaires internationaux
Selon le Dr. David Wu, qui travaille à New York, au siège mondial de la Commission mission et diaconie, le Cambodge compte 47 Eglises Evangéliques Méthodistes constituées sous l'égide des USA, de la Suisse et de la France. On recense également 78 Eglises Méthodistes coréennes, six ou sept Eglises Méthodistes singapourienne et finalement quatre ou cinq Eglises liées à la Fédération mondiale des étudiants d'expression chinoise.
En tout, cela représente quelque 150 Eglises Méthodistes, "mais cela change chaque mois", a dit Wu.
"L'esprit de Dieu agit de façon vraiment merveilleuse au Cambodge", a-t-il ajouté. 11 missionnaires évangéliques méthodistes y travaillent.
Le pasteur Collins a rappelé que seules 16 d'entre les communautés évangéliques méthodistes possèdent leur propre immeuble, comme par exemple celle de Siem Reap. La plupart des congrégations se rassemblent dans des maisons, sous des arbres ou dans des lieux de réunion publics.
Du Centre évangélique méthodiste, on gagne en quelques minutes, par des rues non pavées et pleines de trous, le Centre méthodiste singapourien, un immeuble de béton de deux étages qui n'abrite pas seulement une chapelle, mais aussi des services sociaux en faveur des pauvres. Une autre section du bâtiment est occupée par une école, comprenant un jardin d'enfant et les trois degrés élémentaires du niveau primaire. Ailleurs encore, on y trouve une école professionnelle pour des femmes vulnérables, dont plusieurs ont été sauvées de la prostitution et d'une forte probabilité de contracter le virus du SIDA. Dans une des classes, une demi-douzaine de jeunes femmes apprennent la couture et la coupe de vêtements. Lorsqu'elles auront terminé leur cours, elles recevront une machine à coudre et pourront ouvrir leur propre atelier.
Les méthodistes de Singapour gèrent également un orphelinat hors de la ville, a indiqué Collins. Un quotidien local en langue anglaise, le Cambodian Daily du 25 décembre, a montré des enfants de cet orphelinat présentant un spectacle de danses khmères, classiques et populaires, dans un restaurant situé au bord du fleuve. L'article affirmait que c'était la première fois que ce genre d'art était présenté à Phnom Penh depuis la chute des Khmers rouges en 1979. Quelque 100 enfants, dont les danseurs, reçoivent un toit et une éducation dans cet orphelinat. Celui-ci reçoit une allocation mensuelle du restaurant ainsi qu'un pourcentage sur la vente des billets..
Avec 78 églises dans diverses parties du pays, a déclaré Collins, les méthodistes coréens assurent une forte présence chrétienne au Cambodge. C'est nettement plus que n'en ont les Américains ou les Singapouriens. La mission coréenne vise à créer de nouveaux chrétiens et à implanter des églises.
Les méthodistes coréens, ainsi que la mission de Singapour, se retrouvent une fois par mois avec Collins et le responsable cambodgien de la Fédération mondiale des étudiants d'expression chinoise pour une réunion de coordination. Collins y représente les méthodistes de Suisse et de France, ainsi que sa propre Eglise Evangélique Méthodiste (EEM), celle des USA.
Savoir comment ordonner les pasteurs cambodgiens constitue un point de discussion important pour les responsables missionnaires de Corée, de Singapour, de France et de Suisse et de la Fédération mondiale des étudiants d'expression chinoise, qui forment l'Association des églises méthodistes.
Mais selon M. Chan et le pasteur Collins, la priorité majeure pour l'Eglise Evangélique Méthodiste est bien la constitution d'une Conférence Annuelle (CA) provisoire regroupant tous les membres de l'Association.
La création d'une Conférence Annuelle (CA) à partir d'un si grand nombre d'églises autonomes n'a jamais été tentée auparavant, a dit le pasteur S.T. Kimbrough Jr., représentant de la Commission mission et diaconie. Nombre de ces églises coopèrent les unes avec les autres, mais elles n'ont ni direction, ni administration communes.
En février, les questions relatives à l'ordination, à la mise en place d'une Conférence Annuelle (CA) et à la rédaction d'un Règlement de l'Eglise seront les principaux points de l'ordre du jour d'une délégation de la Commission mission et diaconie qui séjournera une semaine au Cambodge.
Un événement missionnaire
Son programme comprendra également la dédicace du nouveau Recueil chrétien de cantiques et de textes liturgiques, le premier ouvrage du genre à avoir été rédigé en Khmer, la langue cambodgienne, a annoncé Collins. L'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) a publié ce recueil en coopération avec l'Eglise Méthodiste coréenne, celle de Singapour et celle de Malaisie, ainsi que l'Eglise Evangélique Méthodiste en Suisse et en France.
En partant de Phnom Penh, M. Chan a emmené 20 recueils pour Siem Reap. Ils faisaient partie d'un lot de 4'782 ouvrages stockés dans une pièce du Centre missionnaire, une quantité suffisante pour que chaque église locale puisse en recevoir 20 exemplaires pour un prix symbolique.
Kimbrough, qui avait présidé le Comité musique et liturgie de la Commission mission et diaconie, appelle ce recueil "un événement missionnaire". Les 194 chants retenus comprennent des cantiques et des chansons du monde entier, aussi bien que de nouvelles compositions cambodgiennes. Plus de la moitié des cantiques sont d'origine locale, a souligné Kimbrough.
"C'est très excitant", a-t-il ajouté. "C'est une nouvelle aventure missionnaire pour nous tous".
# # #
29 janvier 2002
Source: Service de presse évangélique méthodiste (UMNS)