Église évangélique méthodiste: les retours après l’accord climatique historique de la COP21

par Linda Bloom*

La rivière au centre du Liberia, où Jefferson Knight avait l’habitude de jouer et de pêcher comme enfant est complètement asséchée en raison d’une grave sécheresse.

L'expérience du changement climatique dans son pays a donné à Knight, qui travaille pour l'Eglise méthodiste unie au Libéria, une raison très précise pour assister à la Conférence sur le climat de Paris.

Le 12 décembre 2015, 195 pays ont signé un accord à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques - populairement connue sous le nom de COP21 - . Dans cet accord, ils prennent l’engagement historique de réduire les émissions de gaz à effet de serre qui causent le réchauffement climatique.

« Je pense que le résultat de cet accord est plus fort que ne l’attendaient la plupart des observateurs », a déclaré John Hill, un exécutif de la Commission méthodiste Église et Société qui était présent tout au long de la convention et qui a envoyé un message vidéo, après avoir pris connaissance des termes de l'accord sur son vol de retour.

Ce qui a fait vraiment la différence au cours de ce Sommet qui s’est tenu du 30 novembre au 12 décembre, de l'avis même de Hill, c’étaient les liens qui se sont tissées et le récit des communautés les plus touchées par les changements climatiques. Le résultat n’est pas une solution, a-t-il ajouté, mais un chemin et un cadre pour trouver une solution.

Knight, qui faisait partie de la délégation d'Église et Société présente à la COP21, a eu accès pendant deux jours à la "zone bleue" à l'intérieur de la Conférence officielle, et là il a été mis en relation avec d'autres groupes de la société civile et a rencontré des représentants du gouvernement, y compris ceux en provenance du Libéria.

Cet accès a été un outil de promotion important pour sa délégation, a déclaré le pasteur Liberato Bautista, qui était aussi à Paris en tant que chef du bureau de l'agence auprès de l'ONU.

« Être présent physiquement sur les lieux officiels est crucial », a-t-il expliqué. « Par notre présence, nous avons fait savoir aux négociateurs que nous reconnaissons une valeur ajoutée au processus gouvernemental, et que nous observons et suivons de près ce qu'ils disent et font ».


A partir de la gauche, John Hill et Susan Mullin, U.S., Jefferson Knight, Liberia; Daniel Obergfell, Allemagne, et Jennifer Ferariza Meneses, Philippines, à la Cathédrale Notre Dame de Paris. Ils ont été une partie de la délégation méthodiste unie de la commission Eglise et Société.. Photo aimablement fournie par la commission Eglise et Société

Prendre soin de la création de Dieu

Knight est également venu à Paris dans le cadre de Creation Care Team,(Sauvegarde de la création de Dieu) commission relevant du Conseil Mondial de la Mission (GBGM) de l’EEM, dirigé par le pasteur Pat Watkins. « Personnellement, je vois mon engagement au sein de l’équipe Sauvegarde de la création de Dieu comme une vocation et comme une de mes responsabilités chrétiennes de veiller à ce que la création de Dieu soit correctement prise en charge », disait Knight à l’Agence de presse méthodiste unie (UMNS).

Ses collègues de l'équipe ont le même point de vue. La pasteure Marietjie Odendaal, pasteure de l'Église évangélique méthodiste de Gelterkinden en Suisse, a été encouragée à approfondir le témoignage biblique sur la sauvegarde de la terre.

«J’espère que cela va enrichir nos discussions sur la question et également élargir nos possibilités d’engagement en tant que chrétiens, ensemble et avec des groupes extérieurs à l’église », dit-elle.

Sotico Pagulayan III, un membre de l'équipe du GBGM qui travaille pour l'Eglise méthodiste unie au Cambodge, a dit son hésitation à venir à Paris, après les attaques terroristes meurtrières du 13 novembre.

Toutefois, écrit-il, Dieu « a touché mon coeur », Pagulayan se souvient « qu'il m'a mis dans cette position et situation pour faire briller avec éclat Sa lumière dans ce monde de plus en plus en décomposition ... Je savais que Dieu m'avait appelé à ce moment précis de l'histoire pour être une source d'espoir et un agent de changement et de transformation ».

Comme Knight et Pagulayan, les évangéliques méthodistes et méthodistes de diverses parties du monde venus à Paris étaient déjà au courant des effets du changement climatique dans leurs communautés.

En Argentine, la pluviométrie a été le double de la moyenne, provoquant des problèmes aux agriculteurs et des problèmes d'assainissement dans les grandes villes, a noté Anahí Alberti, un membre de l'équipe du GBGM de Salta. Dans la région nord-ouest, où elle vit, ne pas avoir les six mois de saison sèche habituelle signifie la prolifération d’insectes et « aura une incidence sur l'ensemble de la population en termes de maladies infectieuses tropicales, qui sont principalement transmises par des insectes ».

Apprendre, «en réseau » à Paris

A Paris, les équipes ont pris part à des séances et à des événements de stratégie thématique, assisté à des présentations et à des discussions de groupe, participé à un service religieux œcuménique à la Cathédrale Notre Dame et participé au culte de l’EMU Résurrection à Gennevilliers, où la congrégation se compose principalement de ressortissants de Côte d'Ivoire.

La pasteure Susan Mullin, membre de l'équipe Sauvegarde de la Création du Minnesota, a participé à une table ronde sur la foi, la race et la justice climatique où elle a appris que le problème de l'eau contaminée par les eaux usées a contribué à une hausse de l'ankylostome dans le comté de Lowndes, Alabama, ce qu’on ne voyait généralement pas aux États-Unis.

La pasteure Lisa Garvin, vice-doyenne de la chapelle associée à l'Université méthodiste unie Emory, s’était jointe avec d'autres dirigeants religieux et communautaires à une table ronde organisée par la NAACP et rejoint Hill, dans une ou deux réunions avec le personnel du Département d'Etat américain et l'équipe de négociation des Etats-Unis.

« Toute mon expérience à la COP21 m'a rappelé l'interdépendance de toute la création ─ le climat et l’humanité », a déclaré Garvin.

« Notre délégation méthodiste unie a représenté la diversité globale de notre Église. Quand j’entends les histoires de collègues de la délégation, ça me permet de mieux comprendre la justice climatique ».

Garvin et Jennifer Ferariza Meneses, membre de l'équipe des Philippines, ont assisté à un événement parallèle qui a comporté des approches créatives de femmes offrant des solutions au changement climatique. «Nous étions tous les deux inspirés (par) la passion et l'engagement des femmes leaders autochtones de l'Indonésie, de l’Equateur, d'Afrique et du Canada profonde », a déclaré Ferariza Meneses.

Tout au long de la semaine, Daniel Obergfell, un méthodiste uni d’Allemagne, a rencontré quelques méthodistes "inspirants" qui lui ont montré comment eux-mêmes et autres croyants jouent des rôles différents à la COP21.

Un de ceux-ci était Bill McKibben de 350.org, qui a parlé de la nécessité pour l'Église de devenir une partie du mouvement. « C’est une chose de parler de la création, mais c’en est une autre de prendre les mesures qui sont nécessaires pour la sauvegarder », a déclaré McKibben.

Réactions à l’accord

Pour Watkins, missionnaire méthodiste uni affecté à « la prise en charge de la création de Dieu », l'accord final de COP21 a souligné le travail plus important réalisé ensemble à Paris par l'équipe Sauvegarde de la Création.

Mais il célèbre l'accord, qui offre plus un début de réponse qu’une réalisation qui a échappé aux dirigeants du monde il y a six ans à Copenhague.

« Copenhague a été un effort pour essayer de créer un accord qui serait contraignant pour tous les pays », a souligné Watkins. « C’était quasiment un échec ».

Pour le sommet de 2015, chaque pays a été invité à présenter un plan d'action basé sur sa propre situation économique et politique et sur sa capacité à opérer des changements. Cette fois, dit-il, « on a plus l’impression d’avoir affaire à un accord, à un accord presque universel, et que nous devons faire quelque chose ».

Kirby Fullerton, membre de la First United Methodist Church à Little Rock, Arkansas, et une partie de la délégation du Royaume Uni de la Coalition des jeunes pour le climat à Paris, ont exprimé leur déception parce que les droits humains et autochtones et l'égalité des sexes n’étaient pas spécifiquement abordés dans l'accord final de collaboration.

« Atteindre un avenir sans carbone est intrinsèquement lié à la réalisation d’une planète plus juste et équitable, saine », écrivait Fullerton, étudiante de deuxième année à l'Université d'Edimbourg en Ecosse, dans un courriel.

Mais elle se retrouve pleine d’espoir en des solutions élémentaires. « C’est tout simplement le début de solutions globales, à long terme, juridiques au plus grand défi auquel l’humanité sera confrontée en ce siècle ».

Bloom est reporter au service multimedia de l’UMNS - Agence de presse évangélique méthodiste, stationné à New-York.

14 décembre 2015

UMNS