John Wesley et le méthodisme

Le Musée du Protestantisme dauphinois abrite une exposition temporaire consacrée à John Wesley et au méthodisme en raison du tricentenaire de sa naissance. Le pasteur Paul Brès, ancien missionnaire en Algérie évoquait le jour de son vernissage le rayonnement du méthodisme en France et dans le monde. L'historien Bernard Cottret a fait ressortir les traits révolutionnaires de son ministère. 


En inaugurant l’exposition le 18 avril, le pasteur Paul Brès n’a pas caché son émotion. En effet, tous ses ancêtres ont participé au développement du méthodisme en France et en particulier dans notre région : les Cook, Hocart, De Jersey, Brès, dont Emile Brès-Cook qui a fondé l’association des amis du vieux Poët-Laval, et Emile Brès-De Jersey le fondateur du musée. 


Il a rappelé que les églises protestantes actuelles se sont enrichies par l’apport du méthodisme. A Nyons, Livron, Bourdeaux, Dieulefit, nombreux sont les protestants descendant de familles méthodistes. L’orateur a noté cependant que le méthodisme est fort peu connu en France, alors que l’on trouve des paroisses en Alsace, à Paris, en Languedoc et aussi à Montélimar. 


Ces églises sont entrées dans un processus d’union. 


On compte 37 millions de méthodistes dans le monde: en Amérique du sud, en extrême Orient (Japon, Corée), en Afrique, aux États-Unis. A noter : les responsables méthodistes américains ont, à plusieurs reprises, rendue publique leur opposition à la guerre en Irak. 


Ensuite, le conférencier du jour, Bernard Cottret, qui enseigne l’histoire de la civilisation des Iles Britanniques et de l’Amérique coloniale à l’université de Versailles, a passionné le nombreux auditoire par ses propos, à la fois sérieux et humoristiques. Il a présenté John Wesley comme à la fois conservateur (soutenant le roi déchu d’Angleterre) et novateur, capable de faire exploser les structures ecclésiastiques les plus solides. 


Avec son beau slogan: «le monde est ma paroisse», Wesley a justifié sa prédication hors des églises, sur les places publiques, et motivé l’extraordinaire dynamisme méthodiste à travers le monde, sa vocation mondiale et universaliste. 


Wesley, a affirmé B. Cottret, a profondément modifié l’Angleterre qui souffrait alors de désordre et d’un grand effondrement moral. On a pu dire que si l’Angleterre a pu faire l’économie d’une révolution sociale sanglante, elle le doit à John Wesley et au mouvement méthodiste. 


A l’heure actuelle, tous les protestants de langue anglaise chantent les innombrables et beaux cantiques de Charles Wesley, le frère de John. 


En France, le méthodisme conserve un message très fort auprès des églises évangéliques qu’il a contribué à former, leur rappelant la nécessité des œuvres sociales (n’a-t-il pas inspiré la création de l’Armée du Salut?) Auprès des églises établies et plus traditionnelles, il insiste sur la nécessité de la conversion et de la sanctification. 


Le pasteur Grégoire Chahinian, président de l'Eglise Méthodiste de France (EMF), évoque trois figures clé du méthodisme historique ainsi que trois traits caractéristiques du méthodisme naissant :


Trois hommes…


Trois hommes, tous trois formés à l’université d’Oxford et tous trois ministres consacrés de l’Église Anglicane, sont à l’origine du méthodisme. 


John Wesley (1703-1791), prédicateur infatigable. Il parcourt plus de 360 000 km, la plupart du temps à cheval, et prononce plus de 40 000 sermons. Il est l’organisateur et le chef du mouvement. Son influence est considérable. Beaucoup voient en lui le père du protestantisme moderne. 


Charles Wesley (1708-1788), frère de John. Il est le chantre du méthodisme. Il fait chanter les foules qui reprennent ses cantiques dans les ateliers ou au fond de la mine. Il écrit plus de 6 000 cantiques dont certains, devenus des classiques, sont chantés aujourd’hui encore dans les Églises du monde entier: 


Seigneur, que n’ai-je mille voix pour chanter tes louanges

Et faire monter jusqu’aux anges les gloires de ta croix!


George Whitefield (1714-1770), orateur exceptionnel. Certainement le plus grand prédicateur que l’Angleterre a connu. Un acteur de l’époque prétend que Whitefield peut faire pleurer ou trembler ses auditeurs rien qu’en prononçant le mot Mésopotamie! Son influence s’exerce surtout en Amérique où il se rend à sept reprises et y meurt d’une crise d’asthme. 


Avec un organisateur de génie, un très grand poète et un orateur exceptionnel, le méthodisme atteindra toutes les couches de la population. 


Trois innovations…


L’expérience spirituelle de Wesley et de ses amis, si proche de celle de Martin Luther, les amène, comme pour le réformateur, à désirer le réveil de toute l’Église. Partout où ils le peuvent, ils se mettent à proclamer le message libérateur de la grâce de Dieu qui change les cœurs et les vies. 


Mais, devant l’opposition d’une grande partie de l’Église officielle qui leur ferme ses temples et ses chapelles, ils seront amenés à trois innovations qui vont bouleverser la vie religieuse du pays et rendre leur mouvement très populaire, notamment auprès des masses laborieuses. 


La prédication en plein air. Pour la première fois les prédicateurs sortent des églises pour rejoindre le peuple là où il vit. Et les foules viennent. Nombreuses. Jusqu’à 20 000 et même 40 000 personnes. En plein hiver parfois ! 


La prédication itinérante. « Le monde est ma paroisse », dit Wesley. Il parcourt des milliers de kilo?mètres et prêche l’Évangile hors des structures ecclésiastiques établies pour retrouver la mouvance de la vie. 


La prédication faite par les laïques. L’innovation la plus révolutionnaire. Pour la première fois depuis des siècles, annoncer l’Évangile n’est plus un privilège réservé au clergé. Ces prédicateurs laïques, très proches du peuple et de ses problèmes, donnent au méthodisme son caractère populaire et démocratique. 


Ces innovations conduisent à un christianisme plus pratique, moins théologique, atteignant le peuple dans son propre quotidien.


Source: EEMNI