Le SEL partenaire de la sortie d’un film sur le docteur Mukwege


En République démocratique du Congo, le viol est une arme de guerre. En une douzaine d'années, le gynécologue Mukwege a opéré plus de 30 000 femmes violées et mutilées. Menacé, ce médecin, considéré comme un héros, continue son combat. Reportage de France 24 (2013)

Le 17 février 2016 va sortir dans les salles de cinéma en France un film sur le docteur Mukwege intitulé « L’Homme qui répare les femmes – La colère d’Hippocrate ». Réalisé par Thierry Michel et Colette Braeckman, ce documentaire s’attache à faire connaître le parcours et le combat de cet homme hors du commun.

Fervent évangélique, le docteur Mukwege lutte à sa façon contre les violences infligées aux femmes de son pays, la République démocratique du Congo. Son combat lui vaut, depuis de nombreuses années, une large reconnaissance de la part de la communauté internationale. Il s’est notamment vu décerner en 2014 le Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit du Parlement européen qui est souvent considéré comme l’antichambre du prix Nobel de la paix.


Denis Mukwege, lauréat du Prix Sakharov: "Monsieur le Président du Parlement européen, Mesdames et Messieurs les Représentants des peuples de l'Union européenne, distingués invités à vos titres et qualités, c'est avec beaucoup d'humilité et un grand espoir que je reçois aujourd'hui le prestigieux Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit.

Cette année, vous avez commémoré le centième anniversaire de la Première Guerre mondiale. L'Europe pensait que c'était la dernière et que la civilisation allait triompher. Non, hélas, trente ans plus tard, la folie humaine était de nouveau au rendez-vous.

Depuis, vous avez fait le choix de la paix et de vivre ensemble dans une société orientée vers la liberté et la prospérité.

Dans un contexte sécuritaire de plus en plus instable où les foyers de crise se multiplient, notamment dans le voisinage direct de l'Union européenne, je tiens avant tout à remercier les élus des peuples européens de mettre en lumière les tragédies humaines que vivent les femmes victimes de viols et de violences sexuelles dans l'est de la République démocratique du Congo.

Dans un monde d'inversion des valeurs où la violence se banalise en prenant des formes toujours abominables, refuser la violence, c'est être dissident.

En attirant l'attention du monde sur la nécessité de protéger les femmes en période de conflits armés, vous avez refusé l'indifférence face à l'une des plus grandes catastrophes humanitaires des temps modernes.

Vous avez réaffirmé que la résolution des conflits dans les Grands Lacs et la promotion des droits de l'homme et de la démocratie sont et restent des priorités de la politique étrangère de l'Union européenne.

Par ce prix, vous avez décidé d'accroître la visibilité du combat mené par les femmes congolaises depuis plus de 15 ans et de reconnaître leur souffrance, mais aussi leur dignité et le courage qu'elles incarnent.

(Applaudissements)

Monsieur le Président, la région où je vis est l'une des plus riches de la planète; pourtant, l'écrasante majorité de ses habitants vit dans une extrême pauvreté liée à l'insécurité et à la mauvaise gouvernance.

Le corps des femmes est devenu un véritable champ de bataille et le viol est utilisé comme une arme de guerre.
Les conséquences sont multiples et influent sur l'ensemble de la société. La cellule familiale est désagrégée, le tissu social est détruit, les populations sont réduites en esclavage ou tout simplement acculées à l'exil dans une économie largement militarisée où la loi des seigneurs de guerre continue à s'imposer en l'absence d'un État de droit. Nous sommes donc face à une stratégie de guerre redoutablement efficace.

L'autorité de l'État congolais et ses institutions restent fragiles et ne sont pas encore en mesure ni de protéger la population, ni de satisfaire à ses besoins de base.
Monsieur le Président, rares sont les jours où l'actualité de ma région ne révèle pas un nouveau drame humain.
La semaine dernière, plus de cinquante personnes ont été massacrées à la machette dans le territoire de Beni au Nord-Kivu: les femmes enceintes sont éventrées et les bébés mutilés. Dans l'espace d'un mois et demi, deux cents personnes ont été sauvagement tuées. Comme tout être humain, je voudrais tant ne plus évoquer ces crimes odieux dont mes semblables sont victimes. Mais comment me taire quand, depuis plus de quinze ans, nous voyons ce que même un œil de chirurgien ne peut pas s'habituer à voir? Comment me taire quand nous savons que ces crimes contre l'humanité sont planifiés avec un mobile bassement économique? Comment me taire quand ces mêmes raisons économiques ont conduit à l'usage du viol comme une stratégie de guerre?
Chaque femme violée, je l'identifie à ma femme.
(Applaudissements)
Chaque mère violée, je l'identifie à ma mère et chaque enfant violé, je l'identifie à mes enfants. Comment pouvons-nous nous taire? Quel est cet être humain doué de conscience qui se tairait quand on lui emmène un bébé de six mois dont le vagin a été détruit soit par la pénétration brutale d'un adulte, soit par des objets contondants, soit par des produits chimiques?
Déjà, un seul cas de viol est grave et nécessite une action de tous. Dans mon pays, il y a des centaines de milliers de femmes violées et d'autres milliers d'enfants issus du viol, en plus des millions d'êtres humains morts à cause des conflits. (...)" (Denis Mukwege poursuit, la fin du discours ici: http://goo.gl/IHk4xD)

© Frédérick Moulin 2014 - EU2014 -Tous droits réservés.



TEASER"L'homme qui répare les femmes - La colère d'Hippocrate" de Thierry Michel & Colette Braeckman


Présentation du film qui doit permettre au Dr Mukwege d'annoncer sa candidature pour 2016


SEL - eemni