Liberia, Monrovia : le traducteur de la Bible transmet la parole de Dieu à son peuple

Le pasteur Humphrey C. Kumeh a l’habitude de lire la Bible chaque jour du lever au coucher du soleil au cours des 21 années passées. Encore deux chapitres et il en aura fait le tour.

Quand la pluie ne tombe pas trop drue, une lumière naturelle agréable passe par les fenêtres derrière son bureau. La lumière naturelle est souvent la seule lumière qui existe ; le pays du Liberia se retrouve sans électricité depuis 1989, date à laquelle il a été plongé dans 14 ans de guerre civile. La Conférence Annuelle (CA) de l’EEM au Liberia, à laquelle le bureau de Kumeh est rattaché, a des générateurs, mais elle les emploie avec modération par souci d’économie.

Les Bibles sont placées sur des étagères et étalées sur son bureau. Une photo de sa femme est glissée entre deux éditions, il lui suffit d’un coup d’œil en cas de besoin pour retrouver sa famille.

Kumeh traduit la Bible en Kru/Klao et Sarpo, deux des langues maternelles parlées au Liberia. La Société Biblique Luthérienne et d’autres organisations ont fait des traductions dans les 10 autres langues maternelles.

"Je rédige le texte à la main, après avoir consulté ces matériels," dit-il, indiquant les 26 versions anglaises de la Bible. "Avant de traduire, je dois lire le texte dans chaque version, alors je me réfère à la Bible hébraïque pour voir laquelle de ces traductions est la plus proche de l’original."

Pour Kumeh, toutes les 26 versions anglaises de la Bible sont loin d’être faciles à comprendre, "bien que mon anglais soit correct de mon point de vue," dit-il.

"L’anglais et notre langue ne correspondent pas mot à mot," explique-t-il. "Par exemple, la conjonction 'parce que' en ma langue ne se place pas au début d’une phrase, c’est juste un élément de coordination." Un atout important pour ce travail, c’est de bien connaître sa propre langue bien avant toute tentative de traduire la langue source, dit-il.

Il était sur le chapitre 66 d’Esaïe en septembre. En un jour, si tout va bien, il peut achever 15 versets.

"Pour des récits, vous pouvez faire près de 12 ou 15 versets par jour," dit-il. "La poésie est plus difficile ; le maximum que vous pouvez faire est 10 versets."

L’autre livre de l’Ancien Testament encore à finir, c’est celui d’Ézéchiel.


Poursuite du rêve


Kumeh est le coordonnateur de l’alphabétisation et du département de traduction au sein de la Conférence du Liberia. Le processus de traduction a commencé en 1989 par la missionnaire évangélique méthodiste Nancy Lightfoot. La dédicace du Nouveau Testament a été célébrée en l’an 2000.


Lightfoot est morte une année plus tard dans un accident de voiture. Kumeh était dans la voiture au moment de l’accident et a failli mourir lui-même. Ils étaient sur le point de rencontrer le pasteur Don Slager, consultant en traduction de l’Alliance Biblique Universelle, qui devait examiner le Livre de Job.

Aussitôt remis de l’accident, Kumeh s’est engagé à continuer le travail de Lightfoot.

Avant sa mort, Lightfoot aurait déclaré qu'"il fallait observer le visage des femmes âgées dans une congrégation parlant le Klao au moment où elles entendaient lire la parole de Dieu dans une langue qu’elles comprenaient, c’était une expérience inoubliable."

Kumeh partage la même passion. "S’ils ne savent pas ce que Dieu attend d’eux, alors Dieu n’a aucune raison de les tenir responsables de ce qu’ils doivent avoir fait. Ils doivent savoir ce que Dieu attend de nous. Si le prédicateur que vous êtes ne les forme pas, alors c’est vous qui recevez le blâme."

C’est surtout les femmes qui vont à l’église, ajoute-t-il. "Mais malheureusement ces dames ne savent ni lire ni écrire. Les gens à la base de ce projet savaient qu’il n’était pas suffisant de juste leur dire un verset ; elles avaient besoin d’apprendre à lire pour ainsi pouvoir lire par elles-mêmes la Bible."

Chaque fois que le travail a suffisamment progressé, Slager vient au Liberia pour examiner la traduction. Un comité de relecture d’au moins cinq personnes parlant la langue se rend aussi au bureau.

"Nous leur lisons notre projet," dit Kumeh. "Ils écoutent non seulement la signification, mais le contexte dans lequel certains mots sont employés. C’est un long processus."

Quand on lui demande pourquoi il a choisi une tâche aussi longue, aussi dure, Kumeh regarde par la fenêtre avant de répondre.

"Si j’avais été assigné à la plus grande église du Liberia, je ne pourrais prêcher qu’à deux mille ou trois mille personnes à la fois," dit-il en souriant. "De l’endroit où je suis assis, je prêche quasiment à un million de personnes."


*Gilbert est journaliste auprès de l’Agence de presse évangélique méthodiste basée à Nashville, Tenn.


12 décembre 2005

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Source: Service de presse évangélique méthodiste (UMNS)