Les couples homosexuels doivent pouvoir fonder leur relation sur une base légale clairement dissociée du mariage. Voilà la prise de position que le Bureau de l' «Alliance Evangélique Suisse» (AES) vient de faire connaître en réponse au rapport publié par le Ministère de la Justice (Suisse) sur la situation légale des couples homosexuels. Le Bureau reste néanmoins toujours persuadé que «la pratique homosexuelle va à l'encontre des vues de Dieu pour sa création», l'AES confirme ces propos dans son communiqué de presse publié la semaine dernière. Le Bureau partage avec les rédacteurs du rapport l'avis selon lequel le mariage et la famille sont tout particulièrement à protéger. Aussi les couples homosexuels ne doivent-ils jamais espérer se voir reconnaître d'aucune manière le droit au mariage; il ne saurait en être question. Le Bureau ne reconnaît néanmoins au législateur qu'une marge de manoeuvre limitée. l'AES «reconnaît qu'il existe des hommes et des femmes homosexuels, qui désirent établir leur relation sur une base légale, parce qu'ils sont prêts à s'engager l'un par rapport à l'autre, à se soutenir et à s'entraider mutuellement.» L'AES retient comme une bonne l'idée avancée dans le rapport d'«un partenariat dûment enregistré». Mais il faut veiller à le différencier nettement du mariage, déclare l'AES, ce qui pourrait signifier entre autres: pas de nom de famille en commun, impossibilité d'adopter des enfants, pas de report sur le registre d'état civil et absence de célébration religieuse. L'AES déconseille aussi aux Eglises de bénir les partenariats homosexuels. Pour l'Alliance Evangélique, il est hors de question de mettre le mariage hétérosexuel et le partenariat homosexuel sur le même plan, telle est sa position depuis 1995. L'AES partage avec beaucoup de psychiâtres et de psychothérapeutes la conviction que l'homosexualité n'est pas un état irréversible et recommande pour cette raison l'accompagnement responsable des homosexuels désirant changer d'orientation.
>Source: Reformierter Pressedienst
Commentaire:
Par sa déclaration équilibrée, l'AES s'honore, car elle suggère à l'Etat Fédéral de prendre des mesures juridiques facilitant la vie quotidienne des couples homosexuels (une forme de PACS à la Suisse?) sans céder sur les exigences éthiques chrétiennes.
L'AES ne se départit pas en effet de sa fermeté, quand elle suggère une forme d'homologation du partenariat homosexuel, elle n'entend pas assimiler ce partenariat homosexuel à un mariage; elle tient à ce que l'on fasse la différence entre l'un et l'autre. Mais si le mariage est à défendre en cette fin de siècle, le droit des couples homosexuels -même limité- n'est pas à ignorer non plus, insiste-t-elle. L'Etat est dans son rôle quand il protège ces personnes dans leur condition particulière.
Cette prise de position est d'autant plus courageuse pour l'AES qu'elle ne tient pas l'homosexualité pour une vertu: à ses yeux, l'homosexualité est moralement répréhensible devant Dieu et sa loi et compromet l'ordre créationnel qu'Il a instauré initialement; loin d'être une variante de l'ordre créationnel, l'homosexualité fait désordre comme d'ailleurs tout autre péché, fût-il même bénin.... Par ses propos équilibrés respectant à la fois l'absolu moral de Dieu et la condition humaine des couples homosexuels, l'AES montre la voie à suivre à ses voisins français interpellés toujours encore par la question du PACS. L'AES leur montre qu'il est possible de maintenir à la fois une ligne biblique ferme et claire (condamnation de l'homosexualité) et le sens de la miséricorde (reconnaissance de jure et de facto d'une forme de partenariat entre homosexuels). Cette déclaration de l'AES aura sans doute des répercussions par-delà les frontières helvétiques jusque dans l'hexagone.
Jean-Philippe Waechter