"Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre!": voilà ce que chantaient les anges, selon ce que nous raconte l’Evangile de Luc à propos de la naissance du Christ; et depuis 2000 ans, les chrétiens s’inspirent de ce chant de gloire et de paix. Dieu se fait homme, mettant fin au conflit qui est à la racine de tous les conflits, le conflit entre Dieu et l’humanité. Rendre gloire à Dieu, c’est ôter toute raison d’être aux conflits qui déchirent les êtres humains entre eux. Et cela vaut aussi – et surtout – lorsqu’on justifie ces conflits au nom de la religion.
"Paix sur la terre!": ce n’est pas un vœu, c’est une promesse. La paix nous est donnée avec la naissance de Jésus. Depuis lors, la paix est établie entre Dieu et l’humanité: c’est un don que Dieu nous fait. La paix de Dieu est plus qu’une déclaration écrite, un traité ou un programme; elle ne vise pas simplement à instaurer le calme et l’harmonie, elle ne se réduit pas à l’absence de conflit ou de querelle. Dans la Bible, le mot «paix» a une signification globale, totale: il désigne une vie fondée sur des relations justes, c’est l’état de bien-être dans lequel se trouvent non seulement tous les êtres humains, mais aussi toute la création. La paix règne lorsque – selon la volonté de Dieu – tous ont en suffisance ce dont ils ont besoin pour vivre.
L’Evangile est une invitation à vivre de cette manière. Il s’agit de diffuser ce message, tout particulièrement à la fin de cette année marquée par la guerre et la violence. Lorsque les chrétiens et les Eglises se font les avocats de la paix et de la justice, comme dans leur condamnation unanime de la guerre en Irak, ils renforcent l’accord de paix conclu par Dieu avec l’humanité. De plus en plus d’Eglises et de groupes adoptent, soutiennent et font connaître la Décennie œcuménique "vaincre la violence", lancée en 2001 par le Conseil œcuménique des Eglises, dans le pour but d’encourager les chrétiens et les Eglises œuvrant à l’instauration d’un monde juste et pacifique, et pour montrer des manières pacifiques et non violentes de résoudre les conflits.
La réaction des Eglises devant l'épidémie du VIH/sida constitue une part importante de leur engagement à faire en sorte que le message de paix et de justice atteigne concrètement tous les êtres humains. Plus de 8 000 personnes meurent chaque jour de cette maladie qu’on peut prévenir et maîtriser; c'est bien plus que les décès dus à tous les conflits dans le monde. Si, comme Eglises, nous gardons le silence ou si nous ignorons cette réalité, nous porterons une part de responsabilité dans la souffrance et la mort de personnes qui auraient pu être sauvées. Le message de paix, qui nous appelle à une vie fondée sur des relations justes avec Dieu, nous invite à lutter contre la stigmatisation et la discrimination qui frappent les personnes vivant avec le VIH/sida. Il nous oblige à mobiliser toutes nos énergies pour promouvoir l’éducation et la prévention, ainsi que l’accès de tous aux traitements. Mais surtout, il nous appelle à faire preuve d’attention, d’égards et de respect dans nos relations les uns avec les autres.
Dans ces deux cas – vaincre la violence et répondre à la menace du VIH/sida –, il s’agit de concrétiser l’alliance de paix conclue par Dieu avec l’humanité, et cela dans tous les domaines de la vie : dans les relations entre hommes et femmes, dans les familles, où s’exerce si souvent la violence, en politique, qui est marquée par l’ambition du pouvoir et de la domination sur les autres, et aussi dans un système économique qui fait la guerre aux pauvres et aux défavorisés. Le message de Noël "Paix sur la terre!" porte sur les moyens de surmonter le désespoir et la résignation, il donne le courage d’avancer – à petits ou à grands pas. Il invite tous les êtres humains à faire œuvre de paix et, ainsi, à devenir des enfants de Dieu (cf. Mt 5,9), et à se joindre aux anges pour chanter l’hymne à la gloire de Dieu.
Konrad Raiser, pasteur, professeur et théologien, membre de l'Eglise Evangélique en Allemagne, arrivera fin décembre 2003 au terme d'un mandat de onze ans comme secrétaire général du Conseil Oecuménique des Eglises.
2 décembre 2003
Source: Conseil oecuménique des Eglises (COE)