Suisse, Winterthur : CA 2006 de l’EEM Suisse/France/Afrique du Nord — La journée de dimanche 18 - (2) Message de l’évêque Patrick Streiff lors du culte d’ordination „ Réjouis-toi, tu as un avenir“


Lectures: Psaume 107, 1-3 + 21-12; 1 Thessaloniciens 1, 2 – 7

Sermon: « Qu’ils proclament les œuvres de Dieu avec des cris de joie»


«Réjouis-toi, tu as un avenir», c’est la perspective que j’aimerais ouvrir devant la jeune EEM Suisse aux 150 printemps; j’y associe volontiers l’histoire bi-centenaire des méthodistes en France. Je n’ai pas, à cette occasion, commandé une recherche en sociologie des religions dont je pourrais présenter ici les résultats. Mais sur l’arrière-plan des deux textes bibliques que nous avons entendu pendant les lectures, je vous encourage par cette invitation : «Réjouis-toi, tu as un avenir». Car là où Dieu agit, un avenir s’ouvre à l’être humain, «car il est bon et sa fidélité dure à toujours » (Psaume 107, 1). Là où Dieu agit dans sa bonté, l’être humain ne devrait-il pas se réjouir? En grec, les termes joie et grâce sont des mots très proches parents l’un de l’autre et qui sonnent de manière semblable. L’expérience de la grâce suscite la joie et l’expérience de la joie rend bienveillant.


J’ai l’intention de suivre, avec ma prédication, la démarche en trois temps de ce matin, à savoir tout d’abord un regard rétrospectif, puis un coup d’œil sur l’actualité et en troisième lieu un regard prospectif. 


1) Rétrospective – L’EEM a 150 ans


Les jeunes nous ont entraînés dans le monde de l’EEM tel qu’il était au début de son expansion en Suisse (+ allusions éventuelles à la saynète introductive des jeunes).


J’aimerais relier cette rétrospective au passage que nous avons entendu de la 1ère épître aux Thessaloniciens . De la même manière que Paul assure les Thessaloniciens de son intercession, des immigrants germanophones ont assuré depuis les USA, par leurs prières et leurs dons, les débuts de l’activité missionnaire de l’Eglise épiscopale méthodiste et de la Evangelische Gesellschaft en Suisse. De la même manière que Paul a rappelé aux Thessaloniciens son activité de prédication, nous savons par l’histoire que grâce à l’activité des premiers prédicateurs méthodistes en Suisse, beaucoup de personnes ont trouvé la foi et sont devenues membres de l’Eglise. Au temps des débuts du méthodisme, cela en fut ainsi en de nombreux points de Suisse, en dépit de fortes résistances contre «cette secte étrangère américaine». Néanmoins, la notoriété des méthodistes s’est étendue rapidement, ce qui a fait que l’on a appelé ses prédicateurs à de nouveaux endroits où des gens s’intéressaient à leur message. 


On peut décrire les débuts des méthodistes de différentes manières. On peut diriger son regard sur les nombreuses difficultés, très réelles. Malgré l’aide venue d’Amérique, les ressources en personnel et en moyens financiers étaient fort réduites. Bien des choses que la jeune mission aurait aimé entreprendre n’étaient pas possibles. Trouver des locaux de réunions, voire construire des chapelles était difficile et représentait un risque financier. Mais les rapports de cette époque expriment la joie éprouvée à faire l’expérience de l’action de Dieu. C’est ce qui a donné espérance et foi en l’avenir à la jeune œuvre. Des personnes qui avaient fait l’expérience de la grâce de Dieu et qui, sur le chemin de la sanctification, avaient vécu une transformation de leur vie, étaient un sujet de joie. 


Cette rétrospective m’a aussi fait penser à l’Evangile de Luc, qui souligne à la fois les paroles de réconfort adressées aux pauvres et la joie de Dieu pour chaque être humain qui revient à Lui, comme on le voit, par exemple, dans les paraboles de la brebis perdue, de la drachme perdue et des deux fils, où il y a une grande joie lorsqu’ils sont retrouvés. Cette joie de Dieu sur ceux qui reviennent à Lui me rappelle un mot de Dietrich Bonnhoeffer qui dit que la raison de toute joie véritable est la joie de Dieu à notre sujet.


2) Présent – L’EEM vit aujourd’hui.


Venons-en au présent. Il est différent du temps des pionniers. Et il ne faudrait pas comparer des situations qui ne sont pas comparables. Ce qui importe à l’heure actuelle, c’est de mettre en œuvre ce qui est déjà attesté par le passage du Psaume 107, qui a été lu tout à l’heure. Il y est dit que la raison de toute joie véritable est la joie de Dieu à notre sujet. Plusieurs passages du psaume 107 exhortent les personnes qui ont fait l’expérience de l’action secourable de Dieu à lui dire leur reconnaissance. Il leur est dit « d’offrir des sacrifices de louange et proclamer ses œuvres en criant leur joie » (Ps. 107, 22). A cette époque, les sacrifices de louange consistaient à sacrifier les meilleures parties d’un animal, le reste étant consommé au cours d’un repas en commun. Lors de ce repas, on se racontait mutuellement avec joie ce que Dieu avait fait dans la vie de chacun et ce pourquoi on était reconnaissant. Quand cela se passe aujourd’hui, que ce soit pendant le culte ou dans le cadre d’une cellule de maison, lors du café paroissial ou dans une cellule de prière, devant beaucoup de gens ou en tête à tête, la joie s’allume. Il se confirme que la grâce et la joie vont de pair. L’espérance surgit.


Même une session de la Conférence annuelle peut devenir le lieu d’un tel partage. Cet après-midi, vous aurez l’occasion d’échanger de manière ludique des expériences positives. Bien sûr, une Conférence annuelle comporte également des délibérations sur nombre de questions spécifiques. Cette année, les questions relatives à la qualité de membre ont constitué l’un des points essentiels de nos travaux. Nous avons cherché à déterminer ce que signifie être membre du corps du Christ et quelle est à, cet égard, l’importance du baptême et de la profession de foi. Nous avons à ce sujet des avis divergents, bien que nous nous référions tous à la Bible. Le débat autour de ce thème a montré combien le nouveau Règlement de l’Eglise a en vue un but missionnaire, à savoir que des hommes et des femmes deviennent disciples de Jésus Christ, qu’ils confessent et vivent leur foi. Et quand cela se passe dans nos communautés, il y a motif à se réjouir.


Une Conférence annuelle sert à l’échange et à la prise de décisions, de façon qu’en tant qu’Eglise, nous puissions assumer et mettre en œuvre des lignes directrices communes. C’est aussi à cela que serviront les discussions sur le profil de l’EEM, que nous avons entamées pendant cette Conférence et que nous poursuivrons ces prochaines années. Afin qu’il en résulte plus que le « plus petit commun dénominateur », il sera nécessaire d’entendre, derrière les avis divergents, les propositions constructives et, ensemble, de les amener à maturité. Ceux parmi nous qui, en la matière, réclament une direction ferme et une parole claire de la part de l’Eglise, feraient peut-être bien de s’examiner de manière critique pour voir si, au cas où ils seraient d’avis divergeant, ils ne s’arrogeraient pas le droit d’aller – eux et leur communauté - leur propre chemin. Mais si toutefois nous réussissons à dire plus clairement, sur la base de l’Evangile, quels sont les éléments essentiels qui caractérisent l’EEM, cela ne pourra finalement qu’être bénéfique pour le service de nos différentes communautés.


Au cours de cette Conférence, nous avons reçu quelques hommes et femmes comme membres de plein droit de la communauté de service et nous allons les ordonner aujourd’hui en qualité de pasteurs anciens. Vous, chers ordinantes et ordinants, vous entrez dans une alliance formée par les autres anciens ordonnés. Partout où vous exercerez votre ministère, vous donnerez un visage à l’EEM. Vous avez vous-mêmes fait l’expérience de la grâce de Dieu et vous vous en êtes réjouis. Restez, dans votre ministère, des porteurs et porteuses de cette grâce qui rend joyeux. De nombreuses autres personnes seront ainsi en mesure, grâce à votre ministère, de « proclamer ses œuvres avec des cris de joie ».



3) AVENIR – Réjouis-toi, tu as un avenir


Et nous voici tournés vers l’avenir. J’ai lu récemment un article d’un professeur d’économie britannique qui a écrit un livre sur le bonheur (Richard Layard : Happiness : Lessons from a New Science). Il énumère sept facteurs de bonheur, parmi lesquels figure, évidemment, la situation financière d’un individu. Mais la majeure partie de ces « porte-bonheurs » ont trait au domaine interpersonnel : relations familiales, milieu social et professionnel, amis. Il souligne également que dans les riches sociétés occidentales, une amélioration financière induit un accroissement du bonheur moins efficace qu’une amélioration dans le domaine interpersonnel. Ce qu’il n’évoque pas, en tant que professeur d’économie, c’est l’expérience de la joie de Dieu à notre sujet. C’est pourtant l’un des aspects clés du message de l’Eglise. Faire l’expérience de la joie de Dieu représente la poussée de bonheur la plus forte et la plus durable.


Tant que l’on continue dans nos paroisses à faire des expériences joyeuses et libératrice de la grâce de Dieu, on peut bien dire : « Réjouis-toi, chère EEM, tu as un avenir ».


AMEN


Evêque Patrick Streiff / 11.06.06


Original allemand

Traduct. Frédy Schmid / 17.06.06


Source: EEMNI