Selon un dirigeant méthodiste, le Président de la République démocratique du Congo compte sur l'Eglise pour insuffler un nouvel esprit à son peuple.
Le pasteur Randolph Nugent, Secrétaire général de la Commission pour la mission et la diaconie (General Board of Global Ministries) de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM), a vécu, une après-midi durant, une "rencontre extraordinaire" avec Joseph Kabila, à Kinshasa, capitale du Congo. Ils ont parlé de la manière dont l'Eglise pourrait aider le peuple de ce pays africain, tant dans le domaine des besoins vitaux que dans celui des efforts pour la paix et la réconciliation.
Le pasteur Nugent et plusieurs membres de son secrétariat, accompagnés par l'évêque évangélique méthodiste Onema Fama, du Congo Central et Daniel Ngoy Mulunda-Nyanda, un pasteur évangélique méthodiste au service de la Conférence des Eglises de toute l'Afrique, ont rencontré Kabila le 25 juin. Pendant leur séjour au Congo, du 22 au 27 juin, ils ont également rencontré d'autres membres du gouvernement et ont visité des projets de l'Eglise. Kabila avait personnellement invité Nugent à lui rendre visite.
Le Congo compte près d'un million de fidèles évangéliques méthodistes, dirigés par trois évêques. L'an passé, l'Eglise dans son ensemble a fourni près de 2 millions de dollars USA pour appuyer des projets et des missionnaires engagés dans ce pays.
Nugent a déclaré au Service de presse évangélique méthodiste que Kabila "est profondément reconnaissant pour l'activité de l'Eglise et il l'a invitée parce qu'il est inquiet au sujet du moral de la population". En fait, a-t-il ajouté, le président était plus intéressé par la participation de l'Eglise au renforcement de ce moral et son engagement dans le processus de paix que par l'aide matérielle que l'Eglise pourrait apporter.
Ce souci de redonner courage à la population est partagé par d'autres membres du gouvernement, a dit Lorene Wilbur, un cadre exécutif de la Commission qui était du voyage. Elle a expliqué que ces personnalités officielles ne s'attendent pas à ce que l'Eglise coopère directement avec le gouvernement, mais plutôt qu'elle travaille avec la population et les Eglises.
Kabila tente de rétablir la stabilité dans un pays qui s'est pratiquement désintégré au fil d'années de dictature et de guerres. Connu sous le nom de Zaïre pendant le règne de plus de trente ans de Mobutu Sese Seko, le pays a connu un profond déclin économique et social. Finalement Kabila, l'opposant de toujours, lança un mouvement de rébellion pour conquérir le pouvoir. En 1997, Kabila écarta Mobutu du pouvoir et son premier acte officiel fut de changer le nom du pays en République démocratique du Congo.
Mais les problèmes du Congo ne cessèrent pas pour autant. En août 1998, Kabila dut batailler ferme contre d'autres forces rebelles, appuyées par le Burundi, le Ruanda et l'Ouganda. Pour leur part, les troupes de Kabila furent aidées par l'Angola, le Zimbabwe et la Namibie. Un cessez-le-feu fut signé en 1999 mais ne fut pas respecté et les combats continuaient lorsque Kabila fut assassiné par un garde du corps en janvier dernier.
Son fils, Joseph Kabila, maintenant âgé de 30 ans, remplaça son père en qualité de président. Nugent le qualifie d'"homme doté d'un profond engagement spirituel en faveur de la vie", soucieux de la situation de son peuple, mais "pas du tout imbu de son pouvoir".
Il a également constaté que Kabila était au courant de l'activité de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) au Congo et a déclaré que le président était "ouvert à une approche globale" pouvant remettre le pays sur les rails.
Bien qu'une bonne partie de l'Eglise soit implantée dans des zones toujours tenues par les rebelles, les méthodistes sont restés actifs et la Commission pour la mission et la diaconie a pu s'appuyer sur du personnel missionnaire local pour poursuivre le travail. "Nous avons maintenant des Congolais qui sont en place et gèrent les choses localement", a expliqué Nugent. "Quelle bénédiction. Ils font un travail incroyable".
Mais les besoins sont colossaux. Kinshasa avait été planifiée pour 400'000 habitants; elle en abrite aujourd'hui 6 millions. Nugent et son équipe ont rendu visite à un laïc méthodiste travaillant en qualité de médecin dans le plus grand hôpital de la ville. L'établissement n'a pas de médicaments et pratiquement pas d'eau. Un centre de réfugiés, géré par le Comité évangélique méthodiste de secours (UMCOR) n'a pas de quoi distribuer des rations alimentaires suffisantes - elles sont inférieures au minimum nécessaire à la survie, a déclaré Nugent.
"Il est absolument évident que le pays a été littéralement dévasté; en même temps, on sent fortement qu'il ne demande qu'à redémarrer", a noté Wilbur.
Elle a décrit une visite à un orphelinat construit grâce aux fonds de l'Initiative des évêques évangéliques méthodistes en faveur des enfants et contre la pauvreté. Bien que les enfants les plus jeunes, "nous aient accueillis avec des chants", ils se sont montrés sombres et silencieux pendant le reste de la visite. Les enfants plus âgés, pour leur part, ont présenté une pièce montrant de quelle manière la guerre les avait affectés. "Ce fut l'expérience la plus émouvante de notre tournée", a-t-elle déclaré.
En tant que seule dénomination protestante présente dans tout le pays, l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) peut contribuer aussi bien à la réconciliation qu'à la reconstruction. En plus d'une aide alimentaire immédiate, Nugent envisage pour le Congo une action à long terme, centrée sur les soins de santé, l'éducation et les programmes agricoles. Parallèlement, il souhaite une campagne d'information visant à ce que les méthodistes du monde entier "s'impliquent plus dans cette situation". A son avis, "il y a dans notre Eglise les ressources voulues pour attaquer ces problèmes".
La paix reste une question prioritaire. Pendant que Nugent était à Kinshasa, l'Eglise a inauguré "le pavillon Randolph Nugent pour la paix et la réconciliation", un bâtiment dans lequel les représentants des parties au conflit doivent se rencontrer prochainement pour de nouvelles négociations.
Nugent et la Commission pour la mission et la diaconie ont appuyé les efforts des responsables inter-religieux du Congo pour faire avancer le processus de paix. En janvier 2000, la Commission a invité à New York une délégation de six leaders religieux, dont l'évêque Onema. Ce groupe a assisté à une séance extraordinaire du Conseil de sécurité des Nations unies consacrée à la situation au Congo.
El Hadji Mudilo-Wa-Molemba, chef de la communauté musulmane congolaise et membre de la délégation invitée à New York, était l'un des dirigeants qui ont accueilli Nugent à son arrivée à Kinshasa. "Pour lui, le fait que ce soit un Afro-Américain qui conduise la délégation de la Commission était très significatif", a dit Wilbur.
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*Bloom est directeur de l'actualité au bureau de New York du Service évangélique méthodiste de presse.
Original: anglais
Traduction: F. Schmid/20.07.01
Source: Service de presse évangélique méthodiste (UMNS)