Par Linda Caille (*)
Dans le cadre de la pré-assemblée des femmes, lors de réunions préparatoires aux plénières de l’Assemblée générale du Conseil œcuménique des Eglises (COE), le pasteur Samuel Kobia, Secrétaire général du COE a rencontré plus d’une centaine de femmes déléguées de leur Eglise. A la différence du nombre de jeunes et de personnes handicapées, le nombre de femmes participant à l'Assemblée a augmenté.
Un amphithéâtre de l'université catholique était décoré pour l'occasion aux couleurs de l'Assemblée. Des tentures rouges, jaunes, vertes et bleues encadraient l'estrade et tombaient au sol jusqu'à des paniers de fruits en plastique. Après un accueil chaleureux composé de chants et de danses rythmés par une trentaine de femmes africaines, le "frère Samuel" a dialogué avec ses "sœurs". Samuel Kobia a rappelé les prières et les messages d'encouragements envoyés avant le début de l'Assemblée. Ils sont "autant d'encouragements pour l'avenir". Les femmes ont à leur tour affirmé : "nous voulons montrer que nous sommes avec toi, frère Samuel".
Le Secrétaire général a rappelé l’importance des groupes de femmes dans le mouvement œcuménique notamment au sein du programme "décennie de solidarité avec les femmes", lancé à la fin des années 80. "Les femmes aiment l’Eglise et contribuent au renouveau du mouvement œcuménique, nous ne pouvons pas être Eglise sans elles. Les liens de solidarité entre les femmes d'une même Eglise peuvent être affectés par les tensions y régnant" a-t-il affirmé.
Plafond de verre
Le Secrétaire général s'est réjoui des élections à la présidence de Ellen Johnson Sirleaf au Liberia et de Michelle Bachelet au Chili, élues en janvier dernier. "De nouveaux choix s'offrent aux femmes aujourd'hui". Samuel Kobia a insisté sur l'évolution du rôle des femmes dans les domaines de la vie familiale et nationale. Par exemple, le Parlement rwandais compte depuis novembre 2003, 48,8 % de femmes. L'assistance a réagi avec enthousiasme à l'annonce de ce chiffre. Pourtant, "les pressions qu'elles subissent dans les domaines privés et professionnels de leur vie laissent peu de temps pour prendre du recul et réfléchir" a-t-il nuancé.
Mais le danger reste de concevoir la place occupée par les femmes comme une victoire acquise. "Si certaines ont accès à l'éducation et à l'engagement politique, beaucoup d'entre elles se heurtent à un plafond de verre dans les domaines tels que la direction d'entreprises ou le gouvernement politique". Malgré des avancées importantes dans certaines Eglises chrétiennes membres du COE, un travail reste à faire dans bon nombre d'autres. Des distorsions sociales et économiques perdurent dans certains pays comme l'a rappelé Samuel Kobia. Et d'avancer le cas précis de l'Inde qui malgré une croissance économique exceptionnelle, a vu pratiquer durant ces dix dernières années, dix millions d'avortements sur des enfants à naître de sexe féminin. Les avortements sélectifs seraient favorisés par la pratique de l'amniocentèse alors pratiquée pour déterminer le sexe du fœtus plutôt que pour déceler uns pathologie.
Ecoféminisme et écojustice
Les femmes chrétiennes peuvent "faire une différence" a-t-il lancé, dans les domaines de l'économie, du développement durable et de la justice. "L'économie de la charité est, selon Samuel Kobia, la préoccupation de l'autre dans une relation équitable". Ces contributions peuvent être regroupées sous les termes "d'écoféminisme" et "d'écojustice". Les femmes contribuent à relayer l'information au sujet des "violences faites à la Terre. Détruire l'environnement terrestre, ne pas préserver les ressources en eau sont des atteintes faites à la vie. Nous devons nous battre pour découvrir ce que nous devons faire. L'Eglise a besoin d'une contribution créatrice de la part des femmes".
Après s'être brièvement consultées en petits groupes, les participantes ont réagi aux propos du Secrétaire général. Toutes réclament plus de "soutien de la part de leurs Eglises" notamment les femmes africaines. La violence demeure présente dans les familles. C'est une question de solidarité entre toutes les femmes. "Notre potentiel n'est pas exploité" a relevé l'une d'entre elles. Pour une autre, si la contribution des femmes au mouvement œcuménique est importante, les hommes membres des structures ecclésiales, eux, n'y sont pas favorables. "Le partage du pouvoir est difficilement accepté, a reconnu le Secrétaire général, ces questions doivent être portées lors de l'Assemblée et aussi bien après".
14/02/06
(*) Linda Caille, réformée, est journaliste à Paris, rédactrice en chef du mensuel Mission édité par le Service protestant de mission (Defap).
Source: Conseil oecuménique des Eglises (COE)