<25.08.2000 Macédoine: un camp de jeunesse interethnique rassemble tous les protagonistes de la guerre 

Quand le monde se rassemble pacifiquement, alors il se met à chanter. Cela s'est vérifié également lors du camp de jeunes, qui eut lieu du 7 au 14 août à l'Hôtel Besir au Lac Ohrid au sud-est de la Macédoine, près de Struga. La centaine de jeunes était venue du Kosovo, de la Voïvodine serbe, d'Albanie, de Macédoine, d'Allemagne et des Etats Unis, pour chanter ensemble. Dans la plupart des cas, les jeunes représentent des cultures qui avaient été jusqu'ici en guerre les unes contre les autres. L'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) de Macédoine sponsorise ce camp. Cette semaine de convivialité comprenait une rencontre inattendue, la rencontre du méthodiste EEM le plus connu du pays, à savoir le président Boris Trajkovski. Le camp eut pour thème «Patchwork - un Dieu, une foi, un corps». Le pasteur américain Craig Gaither, pasteur associé de la «First United Methodist Church of Cary, N.C.», a présenté les études bibliques quotidiennes et animé les activités du camp. Le pasteur Craig Gaither avait été régulièrement «volontaire pour un voyage missionnaire aux Balkans» et avait travaillé parmi la jeunesse dans l'ancienne Yougoslavie. L'anglais et le macédonien ont été les langues officielles du camp. Souvent, les propos ont aussi été traduits en albanais et en serbocroate. Mais la langue commune qui reliait les uns aux autres a été le chant. La participante américaine Erin Fisk le confirme. «La musique été le côté plus intéressant de cette semaine. Ce fut extraordinaire de voir se rencontrer et chanter des jeunes de cultures différentes. Nous avons beaucoup chanté, mais aussi en anglais.» A la date du vendredi 11 août, les participants ont rejoint par bâteau le monastère de St Naum, un ancien monastère orthodoxe construit aux alentours de l'an 900 ap. J.C. à la frontière de l'Albanie. Sous le communisme, la région est devenu un site et une plage touristiques. De nos jours, les touristes y viennent pour nager, mais la chapelle est ouverte pour la prière. Les jeunes chantèrent pendant les deux heures que dura leur voyage jusqu'au monastère. Ils continuèrent de chanter par après à St Naum. Au cours du moment de recueillement tenu sous les arbres, Gaither a décrit comment Jésus rassemblait ses disciples au bord du rivage pour leur apporter un enseignement.

«Cette semaine, nous sommes venus les uns vers les autres comme des étrangers», dit-il. «Il se peut que nous ayons à travailler plus dur que d'autres dans cette situation. Ce n'est pas tout d'établir entre nous un simple contact ou de bien accrocher, mais il s'agit de lier réellement conversation et d'avoir entre nous une véritable fraternité. Bien des choses et des gens peuvent vous prendre vos biens, votre argent, mais je ne connais rien qui puisse vous ravir de bons amis. Cette semaine, j'ai découvert que j'avais beaucoup de nouveaux amis.» Ce moment de recueillement s'est achevé par le chant de «Quel ami fidèle et tendre, nous avons en Jésus-Christ» en macédonien. Après une heure de temps libre au bord du lac, les jeunes sont remontés à bord du bâteau et se sont remis à chanter durant tout le trajet de retour jusqu'à l'Hôtel.

Le lendemain, 12 août, Gaither a apporté un enseignement sur le thème «Qui est mon voisin?» Avec plein d'anecdotes puisées dans sa jeunesse passée dans la Caroline du Nord rurale et le racisme qu'il a expérimenté, il a défié la jeunesse de ces différents pays de lui dire qui était leur voisin à la lumière de l'Evangile.

«Dans le cas du Bon Samaritain, c'était l'ennemi qui a pratiqué l'hospitalité,» dit-il. «Il pourrait paraître naturel de passer à côté de quelqu'un qui s'avère être ton ennemi naturel, il lui a fallu du réel courage pour s'arrêter et apporter des secours.»

La tension avait été évidente entre les participants; elle se lisait sur leur visage, parce que beaucoup prenaient conscience de que de récents ennemis étaient assis tout près d'eux. Pourtant, les Serbes et les Kosovars ont choisi de prendre place dans le cercle. Cette semaine a créé de nouveau la confiance entre anciens ennemis. A la fin de la matinée, en un temps de prière et de partage, un jeune serbe dit: «Ce fut une grande semaine pour moi, et cela a été un honneur pour moi de venir serrer les mains de mes voisins du Kosovo.»

Ce ne fut pas seulement des paroles. Les cinq participants serbes avaient été conduits à la gare par un Kosovar, par Enver Kransniqi, un collaborateur de l'UMCOR («United Methodist Committee on Relief»). Les bagages des cinq jeunes avaient été chargés sur la voiture par des jeunes du Kosovo et d'autres Kosovars ont accompagné les Serbes jusqu'à la station de bus.

Durant la semaine, les jeunes ont visité le président Trajkovski et sa famille dans leur résidence d'été au Lac Ohrid. Le président était juste de retour d'un voyage officiel en Croatie. Son ami et ancien pasteur, Mikhail Cekov, l'avait appelé et avait convenu avec lui de la visite le 13 août dernier de ces quelques 90 jeunes campeurs.

Les jeunes ont découvert que Trajkovski n'était pas un leader politique ordinaire, vu qu'il connaissait les chants et la foi confessée dans ce camp pendant toute la semaine. Trajkovski n'était pas seulement le premier protestant à être élu à ces hautes fonctions dans les Balkans, mais il était, comme la majorité des jeunes, un méthodiste EEM. Au cours d'une discussion informelle, ces visiteurs ont découvert qu'il était un membre actif dans son église. Il avait dirigé la jeunesse de son Eglise en Macédoine il y a douze ans en arrière, il était à trois reprises délégué à la Conférence Générale (CG) et continue à être président du Conseil des Eglises de son pays.

Leonora Kurn, un jeune travailleur du Kosovo, a remercié Trajkovski pour son hospitalité. «Nous sommes reconnaissants d'avoir un responsable chrétien dévoué en Macédoine,» ajoutait Kurn.

«En tant que Macédoniens, nous avons le désir de voir un Kosovo nouveau et démocratique, et nous aimerions vous voir mener une vie normale et connaître la prospérité,» répondit Trajkovski. « C'est notre désir que cela vous arrive aussi vite que possible. Nous devons continuer à agir différemment de l'Etat en tant que chrétiens,» ajoute-t-il. «Je travaille avec des collègues à travers le monde pour trouver des solutions aux conflits ethniques, colmater les brèches et remédier aux maux ethniques et politiques. Vous avez vu qu'il était possible d'amener des groupes différents à cohabiter en paix. Je partagerai cette expérience avec mes collègues, quand nous discuterons de tels problèmes.»

Plus tôt dans la journée, durant le culte final du camp, les jeunes avaient une autre occasion de chanter ensemble et d'expérimenter la dynamique de cette semaine. Le groupe dramatique a réactualisé la scène biblique du 'lavement des pieds des disciples par Jésus'. Les membres du groupes ont demandé des volontaires des différents pays pour les aider à faire ce que Jésus avait commandé. Dans une scène touchante, un jeune serbe a lavé les pieds d'un autre jeune du Kosovo.

Ismail Dergun de Pristina, Kosovo, résumait ses impressions du camp en ces mots: «Je regrette que nous devions partir. Nous étions ensemble unis, Albanais, Serbes, Macédoniens. Nous tous, nous servons le même Dieu, et ce fut une bénédiction pour nous de partager entre nous notre commune expérience du Seigneur.»

>Source: United Methodist Reporter Interactive