INDE : LES VIOLENCES, SUJET DE PREOCCUPATION DES CHRETIENS

Une vague de violences déferle sur les chrétiens de l’Inde. Ces agressions à une large échelle suscite émoi et réactions les plus vives. 

L’évêque S.S. Singh s'adresse aux participants du Forum chrétien mondial réuni du 8 au 11 novembre à New Delhi, en Inde. Photo UMNS du révérend Douglas W. Mills. 

Par  Linda Bloom*

Les chrétiens réunis à New Delhi ont promis de ne pas oublier la persécution de leurs frères et sœurs indiens qui ont souffert au cours des derniers mois.

Le meurtre d'un dirigeant nationaliste hindou le 23 août a déclenché des vagues de violences collectives anti-chrétiennes dans l'État de l'Orissa, le déplacement de dizaines de milliers de personnes et causé la mort de quelque 50 personnes. Des milliers de maisons et des dizaines d'églises ont été incendiées. 

«C'est un terrible conflit interreligieux», déclare au service de presse évangélique méthodiste (UMNS) le révérend Douglas W. Mills, responsable de la Commission chargée de l'unité des chrétiens et du dialogue interreligieux au sein de l’Eglise Evangélique Méthodiste. 

Mills a été parmi la cinquantenaire de participants réunis au Forum chrétien mondial en Inde du 8 au 11 novembre. Ils représentaient un large éventail de traditions chrétiennes, ainsi que toutes les régions du monde. 

Deux représentants du Conseil national des Eglises de l'Inde - Taranath Sager évêque de l'Eglise méthodiste de l'Inde, qui lui sert de président, et l’évêque DK Sahu de l'Eglise de l'Inde du Nord, Secrétaire du Conseil - s’est adressé aux participants du forum sur le sort des chrétiens là-bas. Autre personnalité à avoir abordé le sujet a été l’évêque S.S. Singh, président du Conseil des Evêques de l'Eglise méthodiste de l'Inde, et le pasteur Richard Howell, haut dirigeant de l'Alliance évangélique de l'Inde. 

Bien que les rebelles maoïstes aient revendiqué la responsabilité de la mort de Swami Saraswati Lakshmanananda et de cinq jeunes moines, la majorité hindoue a immédiatement accusé les chrétiens de l'assassinat.

En raison de la violence, on estime à 100.000 le nombre de chrétiens du district de Kandhamal (les deux tiers de l'Etat) à avoir quitté leurs villages pour se réfugier dans 14 camps de secours ou rejoindre les maisons de parents, certains cherchant tout simplement à se cacher dans la jungle. 

Protestations des chrétiens

Les chrétiens en Inde ont protesté contre la violence par l’organisation de manifestations, l’envoi de lettres et des appels au gouvernement. Quelques 45000 écoles, collèges et établissements scolaires liés aux églises ont fermé leurs portes pour une journée de manifestations le 29 août et une journée de prière le 7 septembre. 


Le Conseil national des Eglises de l'Inde a coordonné l’aide adressée aux victimes de la violence dans l'Orissa par l'intermédiaire du Conseil chrétien de l’Utkal et du Forum chrétien national en prônant la paix et en diligentant l’aide humanitaire et la reconstruction des maisons, des églises et des institutions.

Mills a rédigé la lettre pastorale du Forum destinée aux chrétiens et aux Eglises de l'Inde. Le Forum y "exprime notre solidarité et notre préoccupation", a-t-il ajouté. Toutefois, il a concédé qu'ils ne pourraient pas faire grand chose. «Nous avons passé quelque temps dans la prière et promis de rapporter leur drame quand nous rentrerons à la maison», a dit Mills. 

La lettre condamne tous les actes de violence, mais  trouve aussi encourageante “la réaction si forte et le soutien manifesté aux victimes de la violence. Nombreux ont été les milieux de l'Inde à avoir manifesté cette solidarité ; ce mouvement a transcendé les barrières de religion. Ce soutien évoque parfaitement l'esprit de tolérance et de compréhension entre les traditions religieuses qui est de tradition dans la société indienne”. 

Les participants au Forum ont exprimé leur préoccupation pour la peur et le traumatisme subis par les victimes de la violence et les conditions de vie insalubres dans les camps où beaucoup ont trouvé refuge. «Nous lançons un appel aux autorités du pays pour qu’ils viennent au secours des personnes déplacées et les aident à reconstruire leur vie», dit la lettre. 

Une délégation rencontre le Premier ministre

Une délégation composée de quatre religieux - qui comprenait Sager et le pasteur Samuel Kobia, méthodiste du Kenya et Secrétaire général du Conseil œcuménique des Eglises (COE) - se sont réunis le 18 octobre avec Manmohan Singh, le Premier Ministre indien, pour s’entretenir des violences actuelles.

Selon Ecumenical News International (ENI), le pasteur Kobia a déclaré lors d'une conférence de presse qui a suivi la réunion que Singh lui a dit qu’une aide fédérale serait fournie en vue de la reconstruction des églises et des maisons chrétiennes détruites suite à ces violences et que la paix sera rétablie dans la région. 

Plaidant la protection des minorités religieuses, Singh a dit que les chrétiens devraient être en mesure de retourner dans leurs villages et de pratiquer leur foi sans crainte, a ajouté le pasteur Kobia. Certains chrétiens auraient été convertis de force à l'hindouisme par des groupes violents. 

Sagar qualifiait la violence "de campagne systématique", selon ENI. "Les attaques contre les chrétiens sont vraiment vicieuses, ils sont simplement abattus comme des agneaux", a-t-il dit.

Le Conseil mondial de la mission (EEM) a également exprimé sa solidarité avec les groupes chrétiens et ses partenaires missionaires en Inde, dont l'Eglise méthodiste de l'Inde et le Conseil national des Eglises de l'Inde. 

Le 26 septembre, six évêques, et notamment Singh Sagar, et les autres membres pasteurs et laïcs, membres du Comité directeur de l'Eglise méthodiste de l'Inde, ont envoyé une lettre au Président Pratibha Patil pour exprimer leur angoisse devant la violence qui s’est déchaînée contre les chrétiens et l’a appelé à «de sérieuses mesures pour maintenir la loi et l'ordre ». L'église comtpe 2460 congrégations et soutient également des écoles et d’autres institutions sociales. 

La lettre de la direction méthodiste a noté que «même les travailleurs sociaux, les femmes et les enfants ne sont pas épargnés ; ils sont soumis à la cruauté et l'humiliation et privés de leurs droits fondamentaux. Inutile de dire, qu’il s’agit d’une violation flagrante des droits de l'homme et d'une discrimination ouverte à l'encontre d'une communauté chrétienne éprise de paix et qui n’a jamais exercé de représailles. . . Pour toutes ces raisons, le tissu social de notre société laïque se déchire, et les relations cordiales qui existaient avec d'autres communautés sont également perturbées ».

Le Forum considère son avenir

La réunion du Forum chrétien mondial de New Delhi - qui fonctionne indépendamment des autres structures œcuméniques - s’est axée sur l'évaluation de sa plus grande rencontre de 2007 au Kenya et a examiné les propositions pour l'avenir, selon Mills. ....

Parce que le forum attire des participants bien au-delà d’autres organismes comme le Conseil œcuménique des Eglises, il permet à des Evangéliques Méthodistes d’entrer en dialogue avec des Evangéliques et des Pentecôtistes. "L'Eglise Evangélique Méthodiste existe en de nombreux endroits où le Forum chrétien mondial est plus représentatif régionalement que le traditionnel mouvement œcuménique", explique Mills. 

Dans une déclaration, le Forum a noté que son intuition initiale “s’était avérée comme un puissant moyen de bâtir des relations de confiance et de respect mutuels entre le plus grand nombre possible de groupes chrétiens”. Le Forum s’est considéré initialement comme une plate-forme “d’échanges d’expériences spirituelles vécues dans une relation vivante avec Jésus”. ...

*Bloom est journaliste de l’Agence de presse évangélique méthodiste à New York.

20 novembre 2008

UMNS