Hanni Gut de Grad, collaboratrice au sein de l'Eglise Méthodiste en Argentine raconte dans le Journal "Kirche+Welt" l'histoire suivante:
«Comme presque la totalité de l'Amérique Latine, l'Argentine a été sous les ordres d'une dictature militaire dans les années 70 (de mars 1976 à décembre 1983). Les dictateurs en uniforme étaient aux commandes. Celui qui n'obéissait pas, était mis sur une liste noire. Qu'est-il advenu des gens de courage et de caractère - également en raison de leur foi - une fois qu'ils ont repéré et dénoncé une injustice? A ce propos une histoire vraie.
Un de nos amis, Julio, habitait et travaillait à Córdoba, au coeur de l'Argentine. Il était instituteur et père de cinq enfants. Et un homme courageux. Et chrétien. Il protestait, quand il repérait une injustice quelque part.... Une nuit, des gens en uniforme ont pénétré dans son logement, l'ont saisi et l'ont traîné loin de sa femme et de ses enfants, très loin. Julio ne sait toujours pas aujourd'hui à quel endroit il fut transporté jadis. On lui avait bandé les yeux. Quelque part dans un camp, il est arrivé, enchaîné, en compagnie d'autres prisonniers, il a été torturé, interrogé, peut-être dans une usine désaffectée ou dans une grange. Julio ne tenait pas à le raconter dans le détail. Sa femme et ses enfants, ses amis et ses parents, la communauté, tous ont prié pour Julio, pour sa libération, pour sa vie, mais aussi pour ses bourreaux et ses ennemis.... des jours durant, des nuits durant. Après beaucoup, beaucoup de semaines, survint un miracle: Julio fut arraché en pleine nuit de sa cellule et de ses chaînes par des hommes en cagoule, conduit un peu plus loin au camp, et on lui dit ceci: 'Julio, nous savons que ton fils aîné se nomme Federico et qu'il a 17 ans. Dès lors que tu racontes quoi que ce soit de ce qui t'est arrivé ici, tu devras le payer de la vie de ton fils. Nous le kidnapperons.' Une fois la menace proférée, ils ont renvoyé Julio libre. Julio a longtemps erré dans les parages, rempli de peur, désorienté, affamé, jusqu'à ce qu'il arrive enfin aux abords de la ville de Córdoba et retrouve ensuite sa maison et sa famille. Il était à ce point épuisé qu'il n'a guère pu se réjouir. Il s'était seulement assis, le regard fixé sur un trou, durant des heures. Aigri, effrayé, apeuré. Il ne comprenait plus le monde. Orlando, un ami et ancien collègue de travail, est venu le visiter tous les jours après son travail. Il s'est assis durant des heures à côté de Julio, sans parler. Une longue période s'écoule, arrive le jour où il a trouvé Julio la Bible à la main; il lui posa alors la question suivante: «Comprends-tu ce que tu lis?» Julio lui a répondu plein d'amertume: «Comment veux-tu que je comprenne après toutes les horreurs qui me sont survenues?» Alors Orlando s'est assis à ses côtés avec beaucoup d'humilité, a pris sa Bible dans ses mains et a commencé avec soin à «épeler» tout à nouveau le B.A. BA de la Bible avec son ami Julio, à partir du plan du salut de Dieu, jusqu'à l'Evangile en passant par les prophètes. Et c'est ainsi que Julio a fini par retrouver lentement de nouveau le sol sous ses pieds, il a appris à faire de nouveau entièrement confiance et appris de nouveau à croire -malgré tout. Il s'y est mis chaque jour, souvent avec peine, mais le miracle est arrivé. Quand Julio m'a raconté l'histoire de sa vie, j'ai pensé inévitablement, involontairement à Philippe et au ministre des Finances de la Reine d'Ethiopie. Lisez donc le texte dans les Actes des Apôtres chapitre 8 (versets 26-40). Je m'étonnais dans cette histoire tout à nouveau de l'obéissance, de l'obéissance inconditionnelle, de la spontanéité, de la rencontre mutuelle. Philippe a accepté sa mission simplement sans broncher. Par ailleurs, Julio a pris la direction plus tard du Home d'enfants Lowe à Mercedes. Il est aujourd'hui mon collègue de travail. Les miracles sont possibles!»
>Source: Kirche+Welt