Le président de la Conférence de l'EEM Côte d'Ivoire, le pasteur Benjamin Boni vient d'accorder un interview à la journaliste MARIE-ADÈLE DJIDJÉ de Fraternité Matin à la veille de l'intégration de cette Eglise à l'EEM mondiale.
• L’Eglise Méthodiste de Côte d’Ivoire va fêter son intégration à l’Eglise Unie du monde. C’est quoi l’Eglise méthodiste Unie du monde?
L’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) du monde, c’est la grande famille des méthodistes du monde. L’expérience a commencé aux Etats-Unis avec John Wesley, c’est lui qui a fondé le mouvement méthodiste mondial au 18ième siècle. Britannique d’origine, il a émigré en Amérique en 1736, suivit de son frère et bien d’autres encore. Les petites communautés méthodistes qui ont été créées, ont été durement éprouvées par la guerre de libération. Ces Eglises vont être plus éparpillées encore à tel point qu’à la fin de cette guerre de libération, c’était des poussières de communautés. Pour qu’elles subsistent, elles vont nourrir le secret dési de mettre leur force ensemble. Cela va commencer par quelques régions, et ensuite tous les Etats, et dans toute l’Amérique: au Nord au Centre, en Amérique latine, un peu l’Europe, l’Asie, en Afrique, en Océanie, pour former un réseau de vie fraternelle.
• Jusque-là vous ne faisiez pas partie de cette famille… Vous étiez coupé de ce monde?
On n’avait quelques correspondances.
• Cela signifie-t-il que l’Eglise Méthodiste de Côte d’Ivoire avait son identité propre? Avec cette intégration, qu’est-ce qui va changer?
Rien ne change fondamentalement. Puisque nous sommes une Eglise autonome. Depuis le 19 février 1985 toutes les Eglises Méthodistes sont des Eglises autonomes à l’exception des Eglises qui sont des champs de mission comme en Afrique occidentale. Au Sénégal, et en Guinée par exemple, l’Eglise est en train de se mettre en place. A travers de grands traits en matière d’organisation dans lesquels l’Eglise se retrouve, mais, il y a la couleur locale; et les Eglises s’organisent selon leur besoin. Donc nous avons comme toujours, la conférence, le district, les circuits, les secteurs, les sections épiscopales. Parallèlement aux classes méthodistes, donc cela ne change pas dans les grandes lignes. Ce qui est fondamental, c’est qu’il n’y a pas de nouveauté en ce qui concerne la doctrine. C’est la même doctrine méthodiste que nous avons jusqu’ici basé sur l’évangile et que Paul résume dans son épître aux Romains: la repentance, couloir de la religion, la foi qui est la porte de la religion; et la vie de la sainteté qu’on appel la sanctification. C’est le témoignage qui est la religion elle-même.
• Pourquoi donnez-vous une telle ampleur à cet évènement que vous allez célébrer au stade Houphouët Boigny?
C’est l’habitude, lorsqu’une Eglise est membre de la grande famille, les autres frères viennent fêter avec elle. C’est symbolique. C’est pour proclamer la grande famille Méthodiste. Pourquoi au stade?... Simplement parce qu’il n’y a pas un autre lieu qui puisse nous contenir. Récemment, lorsque nous avons reçu des frères venus d’autres pays, au stade Champroux, il n’y avait plus de places; certaines personnes sont restées dehors, et elles nous ont dit pour les prochaines festivités de tout faire pour obtenir le stade. C’est la grande fête. On n’est pas toujours sûr que tout le monde puisse y avoir place, surtout que nous sommes prêt d’un million, le stade c’est 50 000…
• Votre Eglise a désormais un nouveau logo.
Le logo… Vous avez la croix, qui est le symbole de Jésus-Christ. C’est l’Eglise dont Jésus-Christ est le fondateur, le chef, la clef de voûte… lui-même a dit dans Jean 15, 5: sans moi, vous ne pouvez rien faire. Donc la présence de Jésus-Christ est et sera continuelle dans l’église jusqu’à son entrée dans le royaume. Nous avons du côté droit de la croix la flamme; c’est le feu, le symbole du St Esprit. Elle est en rouge. Cela signifie l’engagement du chrétien, et aussi que notre engagement doit être total. Jésus-Christ s’est sacrifié pour que nous ayons la vie. Il ne nous demande pas de donner notre sang, mais notre manière de répondre à son amour; cet amour qui est total, c’est de nous engager dans son oeuvre, dans l’adoration, la vie de témoignage; témoigner la vie de Jésus-Christ aux autres.
• L’Eglise Protestante Méthodiste est membre du Conseil national des Eglises Protestantes et évangéliques de Côte d’Ivoire (CENEPECI). Votre adhésion à l’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) du monde vous amène-t-elle à rompre cette première alliance?
Nous ne sommes pas membres du CENEPECI…C’est une longue histoire. Mais lorsque nous sommes invités, nous prenons part aux activités du CENEPECI. Notre ambition, c’est que les relations continuent et s’intensifient. Pas seulement avec le CENEPECI, mais avec la Fédération évangélique de Côte d’Ivoire (FECI). Après les festivités, il y a des préoccupations que nous aurons à partager avec les frères et sœurs du CENEPECI, de la FECI, pour voir comment l’église méthodiste peut, à travers les activités que nous aurons à définir ensemble, collaborer d’une manière plus prononcée avec ces Eglises, de la même manière que nous avons des relations avec l’Eglise Catholique, et l’Eglise Harriste.
• Quelles sont les opportunités qu’offre à l’Eglise Méthodiste de Côte d’Ivoire, son adhésion à l’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) du monde?
Notre ouverture sur le monde méthodiste répond au souci que nous avons depuis 1985 à la conférence inaugurale; celui de nous ouvrir. Nous avons maintenu ce souci, et il y a deux ans que cela s’est concrétisé. Nous voulons nous ouvrir pour partager. C’est très important. Quand vous voyez la vision missionnaire, et l’accent qui est mis de façon particulière sur l’évangélisation, sur la formation pas seulement des pasteurs, mais aussi des laïcs, à quelque niveau que ce soit. L’accent est aussi mis sur l’action sociale. Ces actions se retrouvent dans la vision de l’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM). Donc, en intégrant cette église, notre souci, c’est de concrétiser ces préoccupations que nous avons, de porter ces soucis avec les autres, lorsque nous pourrons faire le partage au plan spirituel, culturel, matériel etc. Lorsque nous étions à Dakar des frères et sœurs d’autres régions disaient que l’Eglise Méthodiste de Côte d’Ivoire va beaucoup apporter à l’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) au point de vue musical.
• Pourquoi?
Etant ici, ils ont vu qu’au point de vue musical, nous avions une grande expérience.
• Vous aussi vous allez beaucoup acquérir au plan économique.
C’est le partage. Nous avons vraiment le souci d’apporter beaucoup en matière sociale. Avant même la guerre, nous parlions de cela et la guerre est venue nous éprouver durement. Il y a tellement de frères et soeurs de ce pays qui sont confrontés aux dures réalités économiques que l’Eglise ne saurait rester indifférente. Nous menons tellement d’actions à l’hôpital protestant, la pouponnière de Dabou, dans des écoles, au vu des cas sociaux que nous prenons en charge. Nous voulons aller plus loin. Comme le dit Jésus, nous voulons avancer en pleine eau. Nous avons le secret espoir qu’à la faveur de cette ouverture, nous pourrons aller plus loin dans les actes sociaux à poser en faveur des hommes. L’Eglise, à l’instar de son maître, doit joindre l’acte à la parole.
• Au plan économique vous serez aussi en relation avec des institutions financières internationales…
L’Eglise Méthodiste est membre de grandes institutions, de ce point de vue quelque chose sera certainement fait, mais nous n’allons pas nous croiser les bras pour dire l’extérieur nous viendra en aide… J’attends des Méthodistes que nous fassions plus d’efforts sur nous-mêmes, tant les projets que nous avons sont nombreux et vitaux pour le peuple Ivoirien, c’est cela qui est important. Même si nous devons recevoir de l’aide, il faut d’abord compter sur nous-mêmes. Nous sommes autonomes.
• Puisque vous parlez de projets à réaliser, peut-on aussi parler de votre temple à Adjamé dont le terrain a été acquis depuis longtemps et qui attend d’être réalisé?
Oui, cela nous préoccupe, il y a eu tellement de choses; il fallait revoir le système financier pour que les ouvriers de l’Eglise aient le pain quotidien. C’est ainsi que nous avons de la communauté méthodiste financière, la guerre a abrégé beaucoup de plan. Il ne faut pas se décourager. Immédiatement après les festivités, ce sera la grande préoccupation des Méthodistes que nous sommes.
• Au moment où vous êtes en joie, et où vous fêtez l’ouverture de votre Eglise sur l’Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) du monde, la Côte d’Ivoire traverse les moments les plus tristes de son histoire. Quel regard jetez-vous sur la situation socio-politique du pays?
En jetant un regard sur la Côte d’Ivoire, je peux tout simplement rendre grâce à Dieu. Parce que la Côte d’Ivoire, en tant que telle, aurait pu être rayée de la carte. Mais, le Seigneur nous a maintenus en vie, il nous a gardés. Le Seigneur continue à avoir sa main de bénédiction sur nous. Il faut que nous le comprenions. Il faut que chacun de nous sincèrement s’engage dans la dynamique de la réconciliation. Il ne faudrait pas que ce soit un vain mot. Il faudrait que nous pouvions, s’il y a lieu, de mettre certains besoins personnels ou régionaux sous l’éteignoir pour que les intérêts nationaux priment, il faut le faire. Et puis en prenant conscience que beaucoup d’Ivoiriens ont perdu la vie, que beaucoup d’Ivoiriens et d’Ivoiriennes ont été contaminés parce que violés, mutilés, beaucoup d’Ivoiriennes ont perdu leurs biens à tel point qu’ils sont obligés pour survivre de tendre la main. Face à tout cela, devons-nous encore retarder les choses? Il faut que résolument chacun de nous s’engage. C’est un appel aux hommes politiques, à nous aussi, chefs religieux, chefs coutumiers, rois etc.…
Journalistes, à tous ceux qui représentent l’opinion. Il faut que tous nous nous rendions à l’évidence que la Côte d’ivoire est fatiguée, le peuple est fatigué, que le peuple aspire à la paix. C’est aussi le lieu d’exhorter les chrétiens que nous sommes à garder les genoux à terre. Nous avons à faire non pas aux humains que nous voyons: nos frères et sœurs, du Nord, du Sud et du Centre. Nous avons affaire à Satan. Cette guerre est avant tout une guerre spirituelle. C’est dommage qu’au moment où nous parlons de ces choses, des frères et soeurs militent encore dans les sectes, les ordres mystiques, donc qui pactisent avec Satan…retournons franchement à Dieu, mettons-nous à genoux. C’est le Seigneur qui fait des merveilles. Notre pays Dieu l’a sous son ombre, et ce n’est pas par la force des chevaux du roi que le roi est libéré.
Source: Fraternité matin