Irak: mises en garde multiples contre les projets de guerre des Etats Unis

L'archevêque catholique de Westminster et l'archevêque anglican de Cantorbéry mettent en garde contre une guerre en Irak, dans les colonnes du "Times"  de ce jeudi.


Le cardinal Cormac Murphy-O'Connor, archevêque catholique de Westminster, dit avoir "de bonnes raisons de s'inquiéter du fait qu'une intervention militaire plongerait le monde arabe dans une guerre contre les pays occidentaux et compromettrait les efforts de paix entre Israël et les Palestiniens".


Le cardinal Murphy-O'Connor, reconnaît les fondements de l'inquiétude des Etats-Unis et de sa Nation, face à la "menace" représentée par le régime du président irakien Saddam Hussein. Il n'en considère pas moins qu'"une guerre en Irak entraînerait d'importantes destructions et souffrances. Elle aurait également de graves conséquences pour notre pays et pour le monde".


Même inquiétude, toujours selon le "Times" pour l'archevêque anglican de Canterbury, George Carey. Celui-ci aurait adressé une lettre dans ce sens au Premier ministre britannique, M. Tony Blair.


L'archevêque de Westminster semble ainsi vouloir répondre aux déclarations du Premier ministre Tony Blair. "Sans des preuves convaincantes, de préférence irréfutables, remarque-t-il, il sera difficile de dissiper les préoccupations dans ce pays et à l'étranger à propos de ce genre d'action".


Un responsable de l'Eglise Evangélique Méthodiste presse Bush de ne pas attaquer l'Irak


Le responsable de la Commission Eglise et Société de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) invite la Maison Blanche à ne pas attaquer l'Irak, mais à chercher une solution pacifique par le biais des Nations Unies.


"L'administration de Bush a déclaré son intention de lancer une guerre contre l'Irak, feignant d'ignorer l'avis de ses alliés, les réserves d'un grand nombre de membres du Congrès, d'experts clefs et de millions de citoyens américains," a dit Jim Winkler, responsable de la Commission Église et Société de l'EEM, dans une déclaration le 30 août.


"Avec une indifférence sans précédent pour les idéaux démocratiques et malgré un manque flagrant de preuves justifiant une attaque préventive, le président a néanmoins donné le feu vert," a-t-il dit.


Il a pressé les évangéliques méthodistes "de s'opposer à cette mesure inconsidérée" et d'encourager le Président Bush à résoudre la menace posée par l'Irak par des voies pacifiques. Des rapports auraient établi que le dictateur irakien Saddam Hussein a stocké des armes de destruction massive, ce qui inquiète les responsables américains.


"Notre église s'oppose catégoriquement aux interventions de nations plus puissantes contre des nations plus faibles," a dit Winkler. "Nous reconnaissons que le premier devoir moral de toutes les nations est de résoudre par des voies pacifiques tout litige qui surgit entre les nations comme au sein des nations." Il a cité la résolution de la dénomination "le Soutien à l'Autodétermination et à la Non-intervention," adoptée à l'origine par l'instance législative la plus élevée de l'église en 1988, amendée ensuite et readoptée en 2000. Cette instance, la Conférence Générale (CG), détermine la politique générale de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM).


"Les évangéliques méthodistes ont le devoir particulier de se prononcer contre toute attaque délibérée," a dit Winkler. "Le président Bush et le Vice-président Cheney sont des membres de notre dénomination. Notre silence pourrait maintenant être interprété comme une approbation tacite de la guerre."


Et d'ajouter: "Le Christ est venu pour mettre un terme aux vieux cycles de vengeance et de violence. Trop souvent, nous avons dit que nous adorons et suivons Jésus, mais avons manqué de changer notre façon de vivre. Jésus a prouvé sur la croix l'échec de la vengeance parrainée par l'Etat. Il est inconcevable que Jésus Christ, notre Seigneur et Sauveur et Prince de Paix, soutienne cette proposition d'attaque."


Il supplie le président et le vice-président de donner une orientation chrétienne à leur politique, ajoute-t-il. "Nous devons comme peuple et nation refonder nos priorités personnelles et nationales pour que priment dans nos coeurs la création de Dieu et les besoins des plus petits, des derniers et des perdus."


La déclaration de Winkler fait suite à celle de 37 responsables chrétiens des Etats-Unis, de Grande-Bretagne et du Canada le 29 août dernier aux termes d'une réunion du Comité Central du Conseil Oecuménique des Églises (COE) à Genève. Parmi les signataires, plusieurs évangéliques méthodistes, et parmi eux le responsable du Conseil National des Églises du Christ aux Etats Unis. 


Le conflit entre les Etats-Unis et l'Irak "peut et doit être réglé par les Nations Unies," a dit Winkler. "Aucune nation membre n'a le droit de prendre l'initiative d'une action militaire unilatérale sans l'approbation du Conseil de Sécurité de l'ONU, une approbation que les Etats-Unis n'ont pas reçue. Sans une telle approbation, les Etats Unis contreviennent aux lois internationales."


C'est aux Nations Unie qu'il revient le soin de régler la question du refus par l'Irak de l'inspection des armes, précise Winkler.


"Une guerre préventive représente un changement majeur et dangereux de la politique étrangère américaine," a-t-il dit. "Il crée aussi un fâcheux précédent pour d'autres nations. Par exemple, qu'est ce qui empêcherait dès lors l'Inde ou le Pakistan d'effectuer une telle attaque contre son voisin pour la simple raison qu'ils pourraient être eux-mêmes attaqués? La guerre préventive ne peut pas devenir un principe généralisé, de peur qu'il ne résulte désastre et chaos." 


Ce ne serait pas "une guerre juste," a expliqué Winkler. On n'a pas fait la preuve que les Etats Unis étaient réellement menacés, a-t-il dit, notant qu'il n'a pas été démontré, preuve à l'appui, que l'Irak ait une tête nucléaire visant les Etats-Unis ou des armes de destruction massive. "On ne peut pas laisser dire qu'une guerre contre l'Irak soit justifiée pour la défense des Etats-Unis. Par ailleurs, les voisins de l'Irak n'ont pas fait appel aux Etats-Unis."


Autres questions posées par Winkler, le risque de pertes humaines conséquentes dans les deux camps, les dépenses financières d'une guerre, ses conséquences et son impact sur l'avenir de l'Irak.


"Le Congrès doit exercer ses responsabilités constitutionnelles et voter sur la question d'entreprendre ou non l'invasion de l'Irak," a-t-il écrit. "La durée du conflit, le niveau de participation à long terme et le résultat final ne sont en aucun cas assurés."


Il a averti que Bagdad serait une cible majeure, une ville gigantesque avec de multiples civils innocents. "Accidentellement ou pas, trop de non-combattants en Afghanistan ont trouvé la mort ces récents mois, nous l'avons vu; c'est le résultat de visées et d'un processus décisionnel malheureux. Combien de civils supplémentaires trouveront la mort?"


"Les Nations Unies estiment que ses propres sanctions [contre l'Irak], les plus sévères jamais imposées à une nation au monde, ont déjà abouti à la mort d'un million de personnes," a observé Winkler. Et, a-t-il noté, le régime de Saddam Hussein a commis beaucoup d'atrocités contre son propre peuple, lui causant une grande souffrance pendant de nombreuses années. Winkler a invité à la prière en faveur des Irakiens et a exprimé son désir "que voie le jour en Irak d'un gouvernement juste et pacifique."


Il a pressé les évangéliques méthodistes à prendre au sérieux les instructions de Jésus à être des artisans de paix et à chercher la justice. "Nous devons nous prononcer maintenant - vis-à-vis du président, des membres du Congrès et de nos médias locaux - que le chemin sur lequel le président cherche à s'embarquer est contraire aux enseignements de Jésus, inconciliable avec la position de l'Eglise Evangélique Méthodiste (EEM) et menace l'autorité de la loi comme principe fondamental de la démocratie.


"Que la fin justifie des moyens est le plus faible de tous les arguments possibles. Notre nation mérite mieux et le monde attend mieux de nous. »

Source: eemni/umns/zt