Israël: un pasteur évangélique méthodiste arrêté après une manifestation avant d'être relâché

par Linda Bloom*


Malgré l'épreuve de son incarcération dans une prison israélienne, le pasteur Gordon "Gordy" Hutchins se soucie moins du traitement qui lui a été infligé que de la situation critique des Palestiniens.


Le pasteur évangélique méthodiste de 46 ans de Tieton, (Washington) fut alors poussé à se rendre en Cisjordanie, où il a été arrêté le 15 novembre avec d'autres manifestants étrangers. "Nous étions là comme des artisans de paix, comme des non violents défendant le principe de la discussion et nous essayions de combler le fossé entre Israéliens et Palestiniens," a-t-il dit à l'Agence de presse évangélique méthodiste lors d'un interview téléphonique du 20 novembre depuis son hôtel à Jérusalem.


Dans un certain sens, précise-t-il, les manifestants ont réussi leur opération. Il a expliqué que personne n'avait été gravement blessé quand un groupe de villageois palestiniens de Jayyous a essayé de stopper des bulldozers israéliens en train de niveler le sol et de dresser un "un mur de séparation". La construction de ce mur a des conséquences pour les villageois: un grand nombre de leurs terres agraires fertiles sont annexées à Israël. Mais l'incident a aussi mené Hutchins et trois autres hommes à faire un séjour de prison.


Il a été brusquement libéré de prison Massyahu à Ramle autour de 21h00 le 19 novembre, mais il n'avait aucune idée de son statut auprès du gouvernement israélien. "Je n'ai pas vu le mondre mot ni rien entendu comme on ne m'a rien dit officiellement," a-t-il dit.


Hutchins était assis à la première rangée des manifestants, avec quelques femmes palestiniennes, au cours de l'incident du 15 novembre. Quand les soldats ont tiré des gaz lacrymogènes en direction des femmes, le pasteur a essayé d'intervenir, mais une "terrible douleur" causée par le gaz l'a gagné un moment. "Les trois minutes où je ne pouvais pas respirer étaient les pires minutes de ma vie," s'est-il rappelé.


Une fois remis, Hutchins et d'autres manifestants ont essayé de s'interposer entre les Palestiniens et les soldats israéliens. Un manifestant, Thomas Linner du Canada, avait été frappé à l'estomac avec la pointe d'une arme à feu et plus tard malmené quand une femme palestinienne est venue et s'est interposée entre lui et le soldat. "C'était probablement la chose la plus courageuse que j'ai jamais vue," a dit Hutchins.


Il a noté que le commandant militaire de ce secteur, présent sur place, était -semble-t-il- particulièrement sadique dans le traitement des manifestants.


Quand les soldats ont essayé d'arrêter le seul manifestant israélien, Hutchins a saisi son bras et ne l'a pas lâché. A la fin, 10 manifestants ont été arrêtés.


Hutchins a tiré de cette épreuve une leçon d'endurance. Après deux heures environ passées sur une base militaire, les manifestants ont été déplacés dans un autre commissariat de police avant d'être emmenés ensuite au commissariat de police de l'aéroport Ben Gurion. A ce moment-là, les femmes avaient été libérées alors que cinq hommes y seront maintenus en détention. L'un d'entre eux, citoyen irlandais, sera aussitôt expulsé.


À 4h00 environ, le 16 novembre - sans avoir beaucoup mangé et ni dormi depuis la veille - les quatre hommes restants ont été emmenés dans un panier à salade pour dormir. Mais en réalité, précise Hutchins, ils ont été régulièrement dérangés par la police qui les a empêchés de dormir. Ils seront finalement conduits à la prison Massyahu, où ils sont parvenus à 7h15. Deux heures plus tard, ils ont été soumis à une fouille au corps et interrogés de nouveau.


"Ce qu'ils essayaient de faire, j'en suis fermement convaincu, c'était de nous faire tout contrôle, en sorte qu'ils aient une raison de nous punir plus tard," a-t-il déclaré.


Les demandes répétées pour obtenir un avocat ou le consulat américain ont été ignorées. Les quatre hommes ont été séparés et déplacés dans des blocs cellulaires différents. Pendant un jour et demi, Hutchins a été assis dans une cellule avec sept autres hommes, aucun d'entre eux ne parlait anglais. Finalement, dans l'après-midi du 17 novembre, il a pu acheter une télécarte au marché noir et appeler un avocat, le département d'Etat américain et l'évêque évangélique méthodiste Elias Galvan de Seattle.


Quand un représentant du département d'Etat est venu le visiter l'après-midi suivante, Hutchins portait toujours les mêmes vêtements que trois jours plus tôt. Le représentant lui a obtenu une serviette, du savon et de l'eau. La nuit suivante, le pasteur a été appelé à la porte et libéré sans explication.


Depuis, Hutchins a rejoint le groupe luthérien avec qui il avait voyagé en Israël et dans les territoires palestiniens. Il a dit qu'il avait été dans ce secteur neuf fois auparavant comme simple touriste, pèlerin et responsable de groupe, mais cette fois il avait voulu se rendre compte par lui-même de "ce qui se passait vraiment ici."


Le pasteur est totalement découragé par ce qu'il a trouvé. "Les habitants de Palestine sont systématiquement détruits," a-t-il dit. "L'objectif d'Israël est en fin de compte d'être les seuls habitants de ce pays."


Hutchins a admis la dureté de ses paroles, mais ajoutait qu'il avait été au cours des années témoin de l'expansion d'Israël au dépens des Palestiniens.


"J'aime Israël et les habitants d'Israël, mais tout est parti de travers, c'est terrible."



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*Bloom est rédactrice en chef du Service de Presse évangélique méthodiste à New York


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Le 20 novembre 2002


Source: Service de presse évangélique méthodiste (UMNS)