Deuxième article de fond que nous reproduisons dans le cadre d'EEMNI tiré du dernier numéro du Messager Chrétien. Il est écrit par le pasteur Pierre Geiser, pasteur à Genevilliers et adminstrateur de la Faculté Libre de Théologie Evangélique de Vaux-sur-Seine.
Les premiers prédicateurs méthodistes arrivèrent en Normandie au lendemain de la révolution française. Th. ROUX en relate les circonstances dans son livre « Le Méthodisme en France». A la suite de la visite d'un commerçant venu de l'île de Guemesey, membre de la société méthodiste, un premier prédicateur fut envoyé à Courseulles-sur-Mer, petit port de pêche près de Caen. Les quelques protestants de cette localité dépen-daient de la paroisse de Caen. Mais la plupart du temps. ils ne pouvaient compter que sur eux-mêmes pour leurs réunions. Les visites du pasteur étaient rares.
Après des débuts modestes, l'oeuvre reçut plus d'attention de la part de la Conférence britannique. D'autres missionnaires furent envoyés. Parmi eux, deux gentilshommes bretons, de famille catholique, qui, sans se connaître. se réfugièrent aux îles de la Manche après la révolution. Pierre du PONT AVICE et Armand de KERPEZDRON se convertirent au contact des Méthodistes et devinrent prédicateurs locaux.
Le travail itinérant de Charles COOK, contribua à établir le méthodisme dans de nombreuses régions de France, et particulièrement dans le midi. Pendant plusieurs années il fut aussi pasteur protestant dans la Vaunage (la plaine qui se situe à l'ouest de Nîmes, entre Vaveirac et Sommières). La proximité de la jeune société avec l'Église issue de la Réforme a été un élément marquant de son développement spectaculaire, et ensuite de son déclin du fait de l'affiliation de bon nombre de postes, à l'Église protestante. Th. ROUX, dans le livre déjà cité, constate avec justesse que la fusion en 1939 était l'aboutissement logique de cette proximité.
Si, lors de l'arrivée des premiers prédicateurs méthodistes sur le sol français, le protestantisme était en piteux état, en raison de la persécution contre les huguenots, et des guerres de religion, leur activité a largement contribué au renouvellement de la vitalité évangélique. L'Alliance Évan-gélique ainsi que la Société des Écoles du Dimanche ont vu le jour au milieu de ce siècle. Parmi les fondateurs et premiers responsables, on note la présence de plusieurs responsables de l'oeuvre méthodiste.
En 1852, la société méthodiste française tenait sa première Conférence Annuelle, à Nîmes. La Conférence était organisée en deux districts Nord et Midi.
Les actes de la deuxième Conférence, tenue à Paris, du 7 au 15 septembre 1853, donnent quelques éléments statistiques permettant de se faire une idée de l'oeuvre méthodiste à cette époque. On compte 105 chapelles ou autres lieux de culte; 19 ministres ou «proposants», 5 évangélistes et 32 prédicateurs locaux ; 831 membres et 122 candidats ; 28 écoles du dimanche dirigées par 148 moniteurs. et contenant 1462 élèves.
Pendant cette deuxième moitié du 18e siècle, la notion de société méthodiste évolua progressivement. Le terme d'Église était utilisé de plus en plus fréquemment. Les rapports, et la lettre aux Églises soulignent la nécessité de vivre le réveil. On nota une progression qui se concrétisa par l'ouverture de nombreux postes. En 1860. la Conférence décida de créer une maison d'étude pour former les futurs pasteurs dont l'oeuvre avait besoin. Cette école était installée à Lausanne, où elle a fonctionné sous la direction du pasteur responsable du poste du Valentin, jusqu'en 1884. Puis à partir de 1889, elle fut rouverte à Paris sous la direction de Matthieu LELIEVRE.
Le réveil de la fin du siècle dernier se poursuivit encore pendant les premières années du 20e. La première guerre mondiale porta un rude coup à l'Église, dont certains postes ont été particulièrement touchés. Après la guerre, les discussions avec la mission méthodiste de Londres, dont l'oeuvre en France bénéficiait encore, par l'apport de quelques pasteurs, ainsi que par des aides financières, ont pesé sur le déroulement des Synodes. La crise économique des années d'entre deux guerres a poussé les Britanniques à réduire leur contribution.
Lorsque les pourparlers pour la constitution d'une Église Unie furent lancés en 1936, la Mission Méthodiste britannique encouragea vivement le synode français à y participer. Après trois ans de discussions. le synode, réuni à Paris enjuin 1939. décida de la dissolution de l'Union pour permettre le rattachement des associations cultuelles à l'Église Réformée de France. Cette décision fut votée par 33 voix pour et 7 contre.
Le 16 janvier 1940, les représentants de 6 Églises, toutes dans le Gard, se réunirent à Anduze pour constituer une nouvelle Union. La principale raison de leur refus d'adhérer à l'Eglise Réformée de France était le contenu du préambule à la confession de foi de la nouvelle Union Réformée. Ce préambule ouvrait la voie au pluralisme doctrinal, incompatible avec les convictions évangéliques des Églises qui avaient refusé la fusion.. Malgré la guerre et le manque de moyens humains et matériels, la petite Union s'organisait peu ou prou pour survivre. Le Pasteur PARKER, qui devait décéder 6 mois après ce premier synode. et le Pasteur SAMOUELIAN étaient les seuls pas- teurs qui restaient acquis à la nouvelle Union.
Le choc de la séparation fut douloureux. Grâce au dévouement des prédicateurs et à l'arrivée de quelques pasteurs venus d'autres Églises évangéliques de Suisse et de France, les activités se poursuivirent.
A la fin de la guerre, l'un des anciens prédicateurs locaux de l'Église d'Asnières. M. CHAZOULE. qui avait été fait prisonnier au tout début de la guerre. revient d'Allemagne. Il obtint l'autorisation du Synode pour recom-mencer une oeuvre à Gennevilliers, redonnant à la petite Union une ouverture à l'évangélisation. Ensuite, il a fallu attendre 1969 pour qu'un nouveau poste puisse être ouvert à Montélimar. dans la Drôme. La vision pour l'évangélisation existait. mais les moyens étaient modestes.
Progressivement, le baptême des enfants fut abandonné au profit de celui des adultes, par immersion. L'Union se rapprocha des Églises évangéliques (Libre, Réformée Indépendante, Mennonite. Baptiste et Assemblées de Frères entre autres). Ces contacts conduisirent nos responsables à constituer, avec les représentants de plusieurs des Unions citées, le Congrès des Églises de Professants.
Depuis la fin des années 70, la question de notre identité méthodiste est clairement formulée. Malgré l'éloignement géographique, les différences caractérisées par l'organisation de type épiscopalien et le rattachement au mouvement méthodiste mondial, les relations avec l'UEEM se sont intensifiés. Aujourd'hui, la question d'un regroupement en une même Union est clairement posée. Notre espoir est que les Églises méthodistes, fidèles à leur vocation d'évangélisation et de réveil, continuent à féconder l'oeuvre de Dieu dans notre pays. Nous prions qu'elles le fassent sans esprit sectaire, acceptant que d'autres chrétiens aient sur tel ou tel point une approche différente. Le méthodisme n'est pas une fin en soi. S'il reste fidèle à la mission qui est la sienne, il contribuera encore au développement de l'oeuvre de Dieu dans notre pays et au-delà.
Pierre Geiser
<Source: Le Messager Chrétien N°9/1999