France : forte mobilisation contre le projet de loi Besson


Appel du 10 juin 2010 : Ne laissons pas fragiliser le droit de l’étranger - Mobilisation de 45 organismes chrétiens contre le projet de loi le 28 septembre 2010 - LA CIMADE : LOI BESSON, LOI DE LA HONTE - Peut-on accepter de renvoyer des malades mourir dans leur pays d'origine ? - Les cinq associations présentes dans les centres de rétention rappellent leur opposition unanime au projet de loi sur l'immigration - Pour aller plus loin - Soyez incollables sur la loi Besson

Rappel : Appel du 10 juin 2010

5 organismes chrétiens (ACAT-France - CCFD - Terre solidaire - FEP - La Cimade - Secours Catholique /CARITAS-France) avaient exprimé leur souci de l’étranger dès le mois de juin par une prise de position sans équivoque :

Ne laissons pas fragiliser le droit de l’étranger

Pour la cinquième fois en sept ans, le gouvernement veut réformer le régime de l'entrée et de l'expulsion des étrangers en France. Cette nouvelle modification de la loi constitue une étape supplémentaire dans la fragilisation d'hommes, de femmes, d'enfants et de familles déjà fortement ébranlés par les difficultés de l’exil.
Ce sont pourtant des êtres humains. Certains fuient la guerre ou les traitements inhumains pour sauver leur vie. D’autres cherchent simplement à améliorer leur situation et celle de leur famille. Ils aspirent, comme nous, à vivre en paix, à trouver le bonheur, à travailler, en France, leur pays d’« accueil ».

Mais le projet de loi va sonner le glas des aspirations de beaucoup et, par là même, de notre hospitalité et de notre humanité en réduisant leurs droits à la justice, à une vie familiale et à la solidarité
 
Si nous laissons faire, les étrangers n’ auront plus le droit d’être entendus !


Jusqu'alors, la loi réclamait le contrôle du juge des libertés si la mise en rétention excédait deux jours avant l'expulsion. Ce garde-fou, indispensable face à l’arbitraire de l’adminis¬tration, est retardé par ce projet de loi : ainsi des expulsions seront possibles pendant cinq jours sur seule décision administrative. De plus, le juge judiciaire ne pourra plus sanctionner certaines irrégularités.
 
Si nous laissons faire, le droit d’asile sera entravé !

 
Ce projet de loi restreint les possibilités d’accéder au territoire pour demander l’asile et place un nombre plus
important d’éventuels demandeurs dans des conditions défavorables pour l’examen de leur demande de protection. Et s’ils sont déboutés et renvoyés, il leur interdit de revenir dans l’Union européenne pour sauver leur vie.
 
Si nous laissons faire, le droit de vivre en famille sera restreint !

 
Des conjoints de Français ou d'étrangers en situation régulière, voire avec des enfants en France, sont parfois sans document de séjour. La loi qui peut déjà interrompre leur vie familiale va durcir les conditions de leur séparation en repoussant toute possibilité de retour. En effet, tout étranger renvoyé peut être « banni » de l’Union Européenne jusqu’à 5 ans : nous refusons cette double peine!
 
Si nous laissons faire, la solidarité restera répréhensible !

 
En modifiant la loi, le projet voudrait calmer les critiques sur le délit dit de "solidarité". En ne modifiant que très marginalement l'exemption pour un tel délit, le projet de loi persiste à dissuader quiconque aiderait, de bonne foi et dans la durée, un étranger dont nul ne sait a priori s'il est en situation administrative irrégulière.
Il est contradictoire de maintenir le principe de fraternité dans la devise de la République et de punir les actes de solidarité.
 
Motivés par la solidarité et la défense des plus faibles, notamment des étrangers, en partenariat avec d'autres membres de la société civile, nos organismes, mouvements, associations et services chrétiens refusent que des mesures de plus en plus restrictives, voire arbitraires, propulsent des milliers d’hommes et de femmes dans la précarité et le désespoir.

Aussi estimons-nous nécessaire d’éveiller les consciences, d’appeler à la vigilance et à l’information sur ce projet de loi qui comporte des dispositions très inquiétantes.

Nous nous engageons à agir pour que la figure de l’étranger ne serve pas de bouc émissaire en France et en Europe.

Initiateurs :
- ACAT-France (Action des chrétiens
pour l'abolition de la torture)
- CCFD - Terre solidaire
- FEP (Fédération de l'Entraide Protestante)
- La Cimade (Service œcuménique d'entraide)
- Secours Catholique / CARITAS-France avec la contribution du SNPM (Service
national de la pastorale des migrants)


Mobilisation de 45 organismes chrétiens contre le projet de loi le 28 septembre 2010

Quarante-cinq organismes chrétiens se sont mobilisées mardi 28 septembre devant l’Assemblée nationale pour interpeller les députés sur les « atteintes graves » que comportent certaines mesures du projet de loi Besson. 

Signataire de l’appel « Ne laissons pas fragiliser le droit de l’étranger », le collectif estime que le texte restreint à la fois les droits à la justice, à une vie familiale et à la solidarité, et qu’il aura pour conséquence de « fragiliser des hommes, des femmes, des enfants, déjà fortement ébranlés par les difficultés de l’exil ».

Le pasteur Claude Baty, président de la Fédération protestante de France,  a apporté son soutien à la campagne « Ne laissons pas fragiliser le droit de l’étranger », en participant à ce rassemblement. Le 17 septembre dernier, le président et le Conseil de la Fédération protestante de France (FPF) avaient participé au cercle de silence qui s’était tenu sur cette même place, et qui marquait la fin du jeûne citoyen contre ce même projet de loi immigration.

La Fédération protestante de France, à plusieurs reprises dans ces déclarations récentes, a rappelé son attachement à l’accueil des étrangers et son souci de leur dignité. Ainsi, 2010 a été dédiée aux migrations au sein de la FPF sous cette interpellation « Et toi, que fais-tu de ton frère ? ». 

Elle appuie les organismes chrétiens engagés dans la campagne « Ne laissons pas fragiliser le droit des étrangers », s’associant à leur inquiétude concernant le projet de loi « Besson » dont certaines mesures portent atteinte au droit de l’étranger.

Militer pour faire prévaloir les droits des migrants est un engagement auquel les protestants demeurent fidèles. Ils le manifestent tant par leurs engagements au sein de la Cimade et de la Fédération de l’Entraide protestante (FEP) que par les prises de position de la Fédération protestante de France et d’Églises qui en sont membres.

Selon le Conseil national de l’Église réformée, « chacun comprend qu’il est nécessaire d’organiser une régulation concertée des flux migratoires ou de démanteler les filières mafieuses. Mais nous ne pouvons accepter qu’il existe en France un jeu électoraliste autour de la déchéance de nationalité, une forme de ‘délit de solidarité’, une volonté délibérée d’amoindrir le rôle des juges, une vision utilitariste des étrangers ».

LA CIMADE : LOI BESSON, LOI DE LA HONTE

La Cimade, organisation d’entraide œcuménique, association de solidarité active avec les migrants, les réfugiés et les demandeurs d'asile, n’y va pas par quatre chemins : la loi Besson est la loi de la honte :  «Parce que nous refusons la mise au ban des étrangers, nous nous opposons à la loi Besson ! Laisser passer cette loi, c’est accepter que l’injustice se légalise, c’est reconnaître et admettre que les étrangers n’ont pas les mêmes droits. Laisser passer cette loi, c’est permettre que des étrangers soient privés de liberté pendant cinq jours sur simple décision de la préfecture pour le seul motif qu’ils sont en situation irrégulière. Laisser passer cette loi, c’est admettre que des étrangers puissent être interdits de revenir sur le territoire français pendant deux ou trois ans alors même que leur vie, leur famille, leur conjoint vit ici. Cette loi de la honte traite les étrangers comme des indésirables qui doivent être éloignés ou enfermés. Nous n’en voulons pas ! Mobilisons-nous pour qu’elle ne passe pas !»

Peut-on accepter de renvoyer des malades mourir dans leur pays d'origine ?

Le projet de loi immigration, intégration et nationalité durcit considérablement, une nouvelle fois, le traitement fait aux étrangers en France, y compris les étrangers gravement malades.

Les dispositions de ce projet vont d'abord largement les empêcher de déposer leurs demandes d'admission au séjour pour raison de santé et vont également les priver de la possibilité de disposer d'un délai suffisant pour saisir le juge qui annule pourtant aujourd'hui près d'une mesure d'éloignement sur deux prises à leur encontre.

Mais surtout un amendement (CL381) présenté par le député M. Thierry Mariani, rapporteur de la loi, a été voté par la Commission des lois le 15 septembre 2010 : il propose de remettre directement en cause le droit au séjour des étrangers gravement malades vivant en France.

Nos organisations demandent à tous les médecins, à tous les parlementaires de s'opposer à cet amendement.


Les cinq associations présentes dans les centres de rétention rappellent leur opposition unanime au projet de loi sur l'immigration

Les cinq associations présentes dans les centres de rétention administrative, ASSFAM, La Cimade, Forum Réfugiés, France Terre d'Asile et l'Ordre de Malte France, rappellent leur opposition unanime au projet de loi sur l'immigration qui est présenté ce jour à l'assemblée nationale.

Les associations ont préalablement indiqué qu'elles regrettaient de ne pas avoir été associées à un véritable débat dès l'élaboration du projet de loi. Elles constatent que l'esprit de la réforme qui leur est présentée durcit les dispositions applicables en matière de privation de liberté des étrangers et par conséquent affectent sérieusement leurs droits fondamentaux.

Elles dénoncent l'usage de la transposition de directives européennes comme prétexte d'une énième modification de la loi. Nombre de dispositions présentées vont en effet bien au-delà des textes européens et sont bien peu inspirées par un esprit républicain.

Elles s'inquiètent du pouvoir qui sera accordé à l'administration dans l'application de la politique de l'immigration, notamment au détriment du pouvoir de contrôle du juge judiciaire qui est une exigence de l'Etat de droit. Les associations constatent que la volonté affichée de simplification par le projet de loi masque en réalité une complication de la législation française en matière de droit des étrangers. Les associations signataires dénoncent plus précisément :

-La privation de liberté d'un étranger et sa rétention pendant cinq jours sans présentation au juge judiciaire garant des libertés individuelles.
-La réduction du pouvoir du juge judiciaire qui ne pourra plus tirer les conséquences légales de certaines irrégularités.
-L'allongement inutile à 45 jours de la durée de la rétention, qui entraînera des souffrances supplémentaires pour les personnes concernées.
-Un nouveau régime des mesures d'éloignement qui porte atteinte au droit des étrangers à une défense équitable.
-La création d'un bannissement administratif sans aucune protection pour certaines catégories de personnes.
-La création de zones d'attente "mobiles", véritable régime d'exception préjudiciable pour les étrangers.
-Les entraves supplémentaires mises à l'exercice du droit d'asile.

Les associations jugent sévèrement cette réforme qui aggravera considérablement la situation des étrangers en rétention et qui pourra conduire à la multiplication de gestes désespérés et à une dégradation du climat dans les centres. Les associations unies dénoncent la précarisation juridique et sociale des étrangers contenue dans ce projet de loi et dans les multiples amendements annoncés.


LA CROIX, protestants.org/La Cimade / eemni