La Commission des questions ecclésiastiques et théologiques a reçu le mandat de se pencher sur la sotériologie à partir de la question cruciale suivante : Comment pouvons-nous parler des thèmes centraux de notre foi? La Conférence annuelle de l'Église méthodiste unie (EEM) Suisse, France et Afrique du Nord a pris connaissance de son rapport à travers son rapporteur et président le pasteur Stefan Moll.
Stefan Moll devant la Conférence annuelle
Trouver les bons mots pour annoncer l’Évangile à nos contemporains préoccupe l’EEM : « On doit trouver les mots adéquats pour parler du salut aujourd’hui, de façon à être entendu et compris ». La question intéresse aussi d’autres cercles (La communauté de travail des Églises chrétiennes, la Fédération des Églises libres (VFG), la Fédération des Églises protestantes de Suisse (FEPS), l’Alliance évangélique suisse (SEA), la Commission du dialogue évangélique / catholique romaine et la Commission de dialogue entre protestants et juifs).
Stefan Moll, en charge du dossier sotériologique au sein de la Commission chargée des questions ecclésiastiques et théologiques, a présenté oralement à la Conférence annuelle les premiers résultats de l'enquête que la commission a menée auprès des pasteurs et des membres de l’EEM sur le thème de la sotériologie (salut). 450 réponses ont été reçues. Pour Stefan Moll, ce nombre est l'expression d'un niveau extrêmement élevé de l'intérêt porté à la question du salut et aux travaux due la commission en charge de la«sotériologie».
Le nombre de réponses montre que les membres de notre Église sont très motivées et enclines à réfléchir davantage sur le sujet. Les résultats de l’enquête n’amène pas pour autant la commission à tirer de conclusions sur la manière dont notre Église doit parler des thèmes centraux de la foi chrétienne.
Dans la moyenne, nous sommes dans l’indécision commune
Ces résultats ne sont pour l'instant que le reflet de ce qui se passe dans notre Église aujourd'hui. Stefan Moll note qu’il n’est pas possible de dégager de tendance claire des réponses données au questionnaire. Il les interprète seulement comme l’expression chez les membres de l’EEM d’une certaine indécision et incertitude sur de nombreux sujets spirituels : « nos membres d’église sont indécis sur beaucoup de sujets et notre Église a manifestement une faible estime de soi».
Notre Église serait-elle une éÉglise incertaine composée de membres peu au clair sur les fondamentaux de la foi ? A quel point les membres de l’EEM sont-ils convaincus du BA BA de leur foi ? Seule 5% sont convaincus que les personnes en quête de salut pourront le trouver dans nos églises ! Cette incertitude se traduit dans notre langage. Ciel et enfer, sont des sujets sur lesquels l’EEM manque de précision. De plus, l’universalisme est défendu par certains.
Dans le débat qui a suivi, il a été souligné que l'on peut interpréter les résultats différemment : on n’est pas seulement capable de voir les choses en noir et blanc mais aussi d’une manière différenciée. L’autre point positif, c’est que les membres de l’EEM sont passionnés pour parler de cette thématique avec des personnes étrangères à la foi. Yes, we can. Il y a là un potentiel certain, déclare Stefan Moll. Cela est prometteur pour le futur.
Dernière remarque de Stefan Moll, elle concerne la tendance de certaines communautés qui consiste à revoir à la baisse l’offre de programmes, et la tentation est alors grande pour elles de se renfermer sur elles-mêmes et d’oublier ainsi leur mission évangélisatrice.
Questions théologiques (Stefan Moll)
La mise en œuvre du mandat de la Conférence annuelle a commencé au cours de cette année de conférence. Une équipe SLI s’est demandé comment permettre à l’Eglise de (re)trouver une manière de s’exprimer par rapport à la sotériologie. SLI est une méthode de travail plutôt lente, mais qui va au fond des choses. Une équipe a pu être formée malgré l’ampleur de la tâche et l’énorme engagement qu’elle exige. Elle est constituée de méthodistes de Suisse alémanique qui y apportent leurs points de vue et leurs arrière-plans différents. C’est très important, car le processus ne doit pas être prédéterminé par des préalables théologiques. L’équipe est dirigée par Claudia Haslebacher et Petra Foede et comprend Sonja Eschler, Markus Hiltbrunner, Stephan Johanus, Gere Luder, Marietjie Odendaal, Thomas Vacher, Rolf Wyder et Stefan Zürcher. Je suis chargé de la direction du projet.
Pour l’heure, l’équipe est en train de se trouver. Il s’agit pour l’instant de définir le contexte dans lequel la parole du salut doit être dite. Il y a un contexte interne : quelle est la culture caractéristique de l’EEM ? Celle-ci permet-elle – ou ne permet- elle pas – de parler de l’opération du salut ? Que nous disons-nous nous-mêmes à ce sujet ?
Mais nous nous intéressons aussi au contexte externe. Nous avons entamé un tour d’horizon : quelles sont les personnes que ce message devrait pouvoir toucher ? Quels sont les groupes sociaux que nous atteignons presque sans effort, parce qu’ils ont une culture semblable à la nôtre ? Qui sont ceux par contre auxquels nous n’avons quasiment rien à dire, parce qu’on ne les trouve tout simplement pas dans les parages d’une communauté chrétienne ? Parce qu’ils nous sont tellement étrangers ?
Pour répondre à ces questions, nous prévoyons d’opérer entre autres par sondages auprès des pasteurs et des membres de l’EEM. Cela nous paraît la manière la plus efficace d’obtenir rapidement et avec un effort raisonnable des réponses utiles.
L’équipe SLI a tout à fait le courage de quitter les voies bien connues – voire les ornières – de la sotériologie dans nos églises locales. Le climat actuel permet de tout dire à ce sujet. C’est ainsi que plusieurs membres de l’équipe s’attaquent au livre de Hans Martin Barth „Konfessionslos glücklich“ (NdT. ‘Heureux sans confession’ – pas traduit en français). Le théologien demande si un langage débarrassé des scories de termes religieux peut aider à suivre Jésus-Christ ? Ou en d’autres termes : être disciple sans religion ? Cette piste ne fournit pas encore de réponse définitive pour notre recherche de langage. Mais elle stimule la réflexion.
Quelques réflexions personnelles pour conclure. Notre société est tellement fragmentée qu’un seul langage ne suffit plus pour parler du salut en Jésus-Christ. C’est pourquoi il est essentiel d’établir sans cesse de nouvelles relations par-delà les fossés sociétaux. C'est le seul moyen efficace, surtout lorsque ces relations vont loin au-delà des frontières de l’EEM et de la sous-culture chrétienne. Le langage est plus qu’un cosmétique verbal. Il est lié à des affirmations théologiques. Ce qui est décisif, ce ne sont pas les mots, mais le contenu de ce que nous disons sur le salut. Je pars de l’idée qu’il faut poser des accents théologiques diversifiés. La théologie paulinienne n’est qu’une des possibilités de parler du salut. La Bible contient tout un bouquet de déclarations relatives au salut, auxquelles nous pouvons nous rattacher aujourd’hui.
Je me demande où cette aventure va nous mener. Nous avons la possibilité d’insérer régulièrement quelques réflexions à ce sujet dans le magazine germano- phone „Kirche und Welt“. Cela permettra de donner aux lecteurs un petit aperçu de ce processus de recherche d’un langage. Je remercie de leur contribution tous ceux qui pensent, prient et croient avec nous. Ces échos contribuent à ce qu’ensemble, nous trouvions dans l’Eglise un/des langage/s que des personnes de milieux sociétaux très divers puissent comprendre et s’approprier en tant que parole du salut. Nous remercions tout particulièrement la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) pour son généreux soutien financier.
Nous espérons pouvoir, avec d’autres, approfondir notre manière de vivre à la suite du Christ. Nous croyons que ce projet y contribue substantiellement.